Propre de l'étape de fabrication, en passant par l'étape de transport et à l'utilisation, voir au recyclage ou au démantèlement quand cela a un sens
Non dangereuse pour la santé (ou dangerosité acceptable)
Sans effet secondaire pour les autres domaines que celui de l'énergie (voir les problèmes posés par les ampoules basse consommation)
Les pistes explorées aujourd'hui ou demain :
Les énergies fossiles (captation de la pollution à la production par exemple)
Les énergies issues de l'atome
Les énergies issues de la terre (exemple agrocarburants, géothermie, énergie souterraine)
Les énergies issues de la mer (exemple énergies des courants, de la houle, issue de la différence de température entre surface et profondeur, énergies produites par les algues)
Les énergies issues de l'air (éoliennes mais aussi différences de température entre deux couches d’atmosphère)
Les énergies issues du solaire voir de l'espace.
Les énergies issues de la biochimie et de la chimie (production de gaz par des bactéries, pile à combustible, etc...)
La jeune fille à la perle est un tableau de Vermeer.
C'est aussi un roman historique écrit par Tracy Chevalier (en 2000) qui raconte l'histoire de cette jeune fille protestante de 16 ans, embauchée comme servante dans la très catholique famille de Vermeer, et dont le peintre fera le tableau pendant ses deux années de présence à son service.
Voici un petit livre à ne rater sous aucun prétexte.
Nous avons créé un groupe de discussion où nous pouvons parler de tout : politique, actualités, écologie, littérature, paranormal, religion... venez nous rejoindre :
"Parce que l'amitié est universelle, nous avons ouvert ce groupe à tous ceux qui ont envie d'échanger, de partager, de connaître d'autres pays, d'autres cultures, dans le respect de chacun.
Depuis un an, j'enregistre des livres audio (libres de droits, bien sûr) alors si cela vous intéresse, allez sur cette page où ils sont tous rassemblés :
Le texte qui suit est de Pierre Desproges. Il est extrait du "Dictionnaire superflu à l'usage de l'élite et
des bien nantis", Edition Point Virgule, n° V31.
Préambule
[...]
En parcourant le Dictionnaire superflu
à l'usage de l'élite et des bien nantis, le lecteur sera d'emblée frappé par la
clarté de l'ouvrage, à tous points de vue. C'est en effet par souci de clarté
qu'il ne comporte de 52 mots, à savoir 26 mots communs et 26 noms propres,
séparés par des pages roses pour faire joli. C'est encore par souci de clarté
que ces mots ont été répertoriés suivant l'ordre alphabétique, a avant b, b
avant c,c avant d, et ainsi de suite jusqu'à z.
Il va de soi que les mots écartés ne l'ont
pas été arbitrairement, mais à la suite d'un choix réfléchi et en étroite
collaboration avec les plus hautes autorités morales, politiques et religieuses qui se puissent rencontrer
dans mon bureau, c'est à dire moi et mon chat sur les genoux parce qu'octobre
est frisquet.
Les mots communs volontairement
écartés du Dictionnaire superflu à l'usage de l'élite et des bien nantis
peuvent se diviser en cinq catégories :
1. les
gros mots, comme bite, couille, liberté, etc.
2. les
mots incompréhensibles, comme zérumbert, galipoute, honk, cancéropaf, etc.
3. les
mots imprononçables, comme pneumnomnie, afctuel, bcnht, etc.
4. les
mots qu'on sait pas si y a deux n comme conard, cannard, etc.
5. les
mots qui font de la peine, comme enculé.
En ce qui concerne les noms propres,
mon choix, totalement serein et exempt de tout objectivité, m'a été
essentiellement dicté par l'indifférence à peine polie que m'inspirent
couramment les artistes inoubliables, les monuments impérissables, les villes
gorgées d'histoire et les grands révolutionnaires qui se sont fait couper la
tête pour les ouvriers puissent aller s'emmerder au Tréport en attendant
Septembre.
L'auteur
a
alunissage n.m., du matin luna, la
lune, et du préfixe a, très joli également.
Procédé technique consistant à déposer des imbéciles sur un rêve
enfantin.
Les accessoires utiles à l'alunissage, outre les imbéciles, sont
:
1. La fusée, sorte de véhicule
autopropulsé comportant de nombreux aménagements sophistiqués.
2. La terre, pour partir.
3. La lune, pour témoin.
Fin 1984, on
évaluait à un, environ, le nombre des alunissages. L'Union soviétique, pourtant
surdéveloppée techniquement puisqu'on y produit en moyenne chaque année une
chaussure de pointure 42 et une bombe thermonucléaire par habitant, n'a jamais
procédé au moindre alunissage. Il faut voir, dans cette attitude
antiscientifique de l'URSS, une volonté de respecter les rêves des enfants, qui
ne manquera pas de surprendre, venant d'un pays dont le but idéologique avoué
est d'établir une société comprenant plus de censeurs que de censurés, sans
brûler les juifs.
b
bleu,e adj. et n. m. [bloï, blo, blef, blou, bloue, blau, bla, XIe
s.]. Qui est d'une couleur voisine du rouge, mais pas très : un ciel bleu, des
yeux bleus, les flots bleus, une Opel Kadette bleue. Fig. Bouch. : un steack
bleu; s'emploie pour désigner un steack rouge. Fig. Mar. : bizut; "Faut
pas me prendre pour un bleu" (Rakham-le-Rouge).
c
chaussure n.f. Objet que l'on porte à son pied dans le but de l'isoler
des sols froids ou grumeleux.
La pénurie de chaussures désoblige le grincheux.
d
directeur n. m., du latin di, la première porte, et rectus, à droite.
Depuis l'aurore de l'humanité, et jusqu'à la semaine prochaine
si les troupes du pacte de Varsovie ne se foutent pas sur la gueule avec celles
de l'OTAN, le mot "directeur" a toujours désigné un personnage
important. Alors qu'une blanche vaut deux noires, un directeur vaut douze
Berrichons au moins.
On ne dit pas "un petit directeur", on dit "un
chef de rayon". On ne dit pas "un grand directeur", on dit
"un chef de diamètre".
Il y a en moyenne beaucoup plus de directeurs dans une
administration que dans un orchestre de jazz.
Le féminin de "directeur" est "la femme du
directeur".
e
endive n. f. Sorte de chicorée domestique que l'on élève à l'ombre
pour la forcer à blanchir. La caractéristique de l'endive est sa fadeur :
l'endive est fade jusqu'à l'exubérance.
Sa forme, qu'on peut qualifier de n'importe quoi, genre machin,
est fade.
Sa couleur, tirant sur rien, avec des reflets indescriptibles à
force d'inexistence, est fade.
Son odeur, rappelant à l'amnésique qu'il a tout oublié, est
fade.
Son goût, enfin, puisque, dit-on, de nombreux pénitents
mystiques préfèrent en manger plutôt que de crapahuter sur les genoux jusqu'à
Saint-Jacques-de-Compostelle, atteint dans la fadeur gastronomique des sommets
que le rock mondial frôle à peine dans la pauvreté créatrice.
L'endive, en tant que vivante apologie herbacée de la fadeur,
est l'ennemie de l'homme qu'elle maintient au rang de quelconque, avec des
frénésies mitigées, des rêves éteints sitôt rêvés, et même des pinces à vélo.
L'homme qui s'adonne à l'endive est aisément reconnaissable, sa démarche est
moyenne, la fièvre n'est pas dans ses yeux, il n'a pas de colère et sourit au
guichet des Assedic. Il lit Télé 7 jours. Il aime tendrement la banalité. Aux
beaux jours, il vote, légèrement persuadé que cela sert à quelque chose.
f
femme n.f., du latin femina. Etre humain de sexe non masculin.
"La femme est le produit d'un os surnuméraire", disait
BOSSUET qu'on ne saurait taxer de misogynie eu égard à l'exquise compréhension
qu'il afficha toute sa vie à l'endroit de la gent féminine, huguenotes et
catins exceptées.
Cette définition toute nimbée de délicatesse semble aujourd'hui
quelque peu restrictive. La femme, à y regarder de plus près, est beaucoup plus
qu'une excroissance osseuse. La femme est une substance matérielle organique
composée de nombreux sels minéraux et autres produits chimiques parés de noms
gréco-latins comme l'hydrogène ou le gaz carbonique, qu'on retrouve également
chez l'Homme, mais dans des proportions qui forcent le respect.
Diversement amalgamés entre eux en d'étranges réseaux
cellulaires dont la palpable réalité nous fait appréhender l'existence de Dieu,
ces tissus du corps féminin forment les viscères. Certains sont le siège de
l'amour.
La femme est assez proche de l'Homme, comme l'épagneul breton. A
ce détail près qu'il ne manque à l'épagneul breton que la parole, alors qu'il
ne manque à la femme que de se taire. Par ailleurs, la robe de l'apagneul
breton est rouge feu et il lui en suffit d'une.
Dépourvue d'âme, la femme est dans l'incapacité de s'élever vers
Dieu. En revanche, elle est en général pourvue d'un escabeau qui lui permet de
s'élever vers le plafond pour faire les carreaux. C'est tout ce qu'on lui
demande.
La femme ne peut se reproduire seule, elle a besoin du secours
de l'Homme, lequel, parfois, n'hésite pas à prendre sur ses heures de sommeil
pour la féconder. Des observateurs attentifs affirment que la femme prend un
vif plaisir dans cette satisfaction de sa viviparité.
La gestation, chez la femme, dure deux cent soixante-dix jours,
au cours desquels elle s'empiffre, s'enlaidit, gémit vaguement, tout en
contribuant à faire grimper les courbes de l'absentéisme dans l'entreprise.
Au bout de ces neuf mois, le petit d'Homme vient au monde.
L'accouchement est douloureux. Heureusement, la femme tient la main de l'Homme.
Ainsi, il souffre moins.
g
gynécée n. m., du grec gunaïkos, la femme. Appartement de femmes à
Athènes et à Rome, dans l’Antiquité, ou à Vierzon, dans le Cher, mais là ça ne
compte pas, c’est un bordel.
On retrouve également le terme gynécée dans le vocabulaire arabe
littéraire classique, où il prend un sens nettement différent, " gynécée
" signifiant ici –littéralement – « non connaissance », comme le souligne
son utilisation dans ce dialogue extrait des Contes des mille et une nuits :
" Ou kilé le misée di Lôvre ?
- Gynécée pas.
"
h
hémiplégique adj. et n. Relatif à
l'hémiplégie. Personne atteinte d'hémiplégie, c'est-à-dire de la paralysie de
la moitié du corps provoquée le plus souvent par une lésion cérébrale dans
l'hémisphère Nord, où les nuits sont plus fraîches.
"Qu'on soit de gauche ou qu'on soit de droite, on est
hémiplégique" dit un jour Raymond Aron à Jean Paul Sartre qui lui répondit
: "Je ne vois pas très bien ce qui vous voulez dire par là. Par là non
plus."
Remarque : certains grammairiens dignes de foi pensent que le
"H" des mots Hémiplégique, Haricot, Havet sont en réalité des
"N" dont la barre centrale aurait été culbutée par les Huns.
Hypothèse qui ne manquera pas de séduire; le bon usage voulant que l'on dise
une Némiplégique, un Naricot, un Navet. Exemple : "Oh ! le beau
Navion" (Nelly Coptère, Le "H" à Spirou, éditions Dupuis).
i
insecte n.m., du latin insectus; sous
le tabouret. Ainsi le mot insecte désigne-t-il un animal si petit qu'il peut (à
l'aise) passer sous un tabouret sans ramper, alors que le python, si. Les
insectes sont des invertébrés de l'embranchement des articulés. Il n'y a pas de
quoi se vanter. Leur corps, généralement peu sensible à la caresse, est entouré
d'une peau à chitine d'aspect volontiers
dégueulasse. Il se compose de trois parties :
La tête, avec deux antennes
que l'enfant aime à couper au ciseau pour tromper son ennui à la fin des
vacances, deux gros yeux composés à facettes et peu expressifs au-delà du
raisonnable, et une bouche très dure garnie d'un faisceau redoutable de
sécateurs baveux dont la vue n'appelle pas le baiser.
Le thorax, lisse et
brillant, affublé d'un nombre invraisemblable de pattes et le plus souvent
garni de deux paires d'ailes dont la finesse des nervures ne manque pas de
surprendre, chez un être aussi frustre. C'est grâce à ses ailes que l'insecte
peut vombrir, signalant ainsi sa présence au creux de l'oreille interne de
l'employé de banque assoupi.
L'abdomen, divisé en gros
anneaux mous et veloutés et percé sur les côtés de maints trous faisant
également office de trachées pulmonaires ("Ce qui est étrange, chez la
libellule, c'est qu'elle respire par où elle pète", MAURICE GENEVOIX,
Humus.)
Il existe plusieurs millions d'espèces d'insectes. Certains
vivent en Seine et Marne, au Kenya, ou sur un grand pied, tel le cafard landais
qui, comme le berger du même nom, vit juché sur des échasses pour dominer
fièrement les ordures ménagères dont il est friand.
Certains insectes, comme la mouche des plafonds, possèdent des
ventouses sous les pattes qui leur permettent de se coller aux ptères.
j
judaïsme n. m. Religion des juifs, fondée sur la croyance en un Dieu
unique, ce qui la distingue de la religion chrétienne, qui s'appuie sur la foi
en un seul Dieu, et plus encore de la religion musulmane, résolument
monothéiste.
k
kamikaze n.m. (mot japonais signifiant tempête providentielle). Exemple
: " Après dissipation des brumes matinales, les kamikazes viendront
réchauffer l'atmosphère au large des côtes."
Par extension, le mot "kamikaze" a désigné, pendant la
Seconde Guerre mondiale, les pilotes-suicide japonais qui venaient s'écraser
sur les porte-avions américains pour vérifier le principe d'Archimède dans la
rade d'Hawaï.
En temps de paix, le kamikaze s'étiole. N'ayant nul porte-avions
sur lequel s'abattre, il se sent inutile à la société. L'envie de se suicider
l'étreint et, croyez-moi, pour quelqu'un dont la raison de vivre est de mourir,
l'idée de mort est invivable. Je ne sais pas si je suis clair, mais ça m'est
égal.
Quand l'envie de se suicider étreint le kamikaze, nous devons
l'aider à affronter gaiement son autodestruction. Il est du devoir du chrétien
d'assister son frère nippon aux portes de l'Au-delà, sans compter qu'un
militaire de moins, c'est toujours ça de pris.
Pour aider un kamikaze désespéré à en finir, il suffit de le
mettre au bord d'une falaise et d'imiter le cri du porte-avions. Aussitôt, le
malheureux se jettera dans le vide, les bras en croix, en imitant le cri du
chasseur-bombardier équipé d'un moteur de 960 CV, et en hurlant : "Banzaï
!", et qui signifie littéralement : "Hop ! ".
La femelle du kamikaze s'appelle la kamikazette. Plus fluette
que le mâle, il suffit de la pousser du haut du tabouret pour qu'elle plonge
sur la moquette en imitant le cri de l'ULM et en hurlant les mêmes conneries,
mais un ton au-dessus.
Pour se reproduire, le kamikaze, après une danse d'amour assez
fastidieuse et suintante de simagrées extrêmes-orientales, dispose la
kamikazette au centre du lit nuptial. Puis il grimpe sur l'armoire Henrito II
et se jette dans le vide en craint : "Bito, bito ", ce qui signifie
littéralement :" I love you. " Quand le lit casse, on dit que l'hiver
sera rigoureux.
l
lazariste n. m. Nom donné aux membres de la Société des prêtres de la
Mission, fondée en 1625 par Saint Vincent de Paul, et appelés ainsi parce
qu'ils adoraient la gare Saint-Lazare, alors qu'il n'y a pas de quoi.
Le seul intérêt de la gare Saint-Lazare réside dans sa capacité à contenir des trains. L'un d'entre
eux, baptisé " Train pour Lisieux " sous prétexte qu'il va à Lisieux,
présente la particularité – comme son nom l'indique – d'aller à Lisieux.
Comme les francs-maçons ou les Haré-Krishna, les lazaristes se
réunissent en douce la nuit dans des caves où ils se déguisent en n'importe
quoi avant de psalmodier des dérisoires incantations à Jean-Baptiste
Locomotive, l'inventeur du chemin de fer, qui sera probablement canonisé avant
que ça me reprenne.
m
mégathérium n. m. , du grec méga,
grand, et thérion, bête. Mammifère de l'ordre des édentés, qui vivait au début
du quaternaire en Amérique du Sud et dont la taille pouvait dépasser quatre
mètres cinquante.
Une étude détaillée du squelette du mégathérium nous permet de
penser que cet animal était vivipare et que, par le fait, il avait tendance à
se reproduire comme mon cousin Christian.
Le seul ancêtre connu du mégathérium est le maximégathérium,
dont la taille pouvait atteindre vingt-cinq mètres. On peut raisonnablement
penser qu'il ne s'entendait même pas péter.
En 1892, le paléontologue suisse Jean Christophe Lexumet a
découvert dans la Pampa le squelette parfaitement conservé d'un mégathétrium de
neuf mètres vingt ! Un an plus tard, à l'automne 93, mourait Jules Ferry. Bien
qu'il n'y ait aucun rapport de cause à effet entre ces deux événements, nous ne
saurions manquer une si belle occasion de ricaner une fois de plus sur la tombe
de cette baderne colonialiste à qui nous-mêmes et nos enfants devons de voir
les plus belles heures de nos jeunes existences totalement gâchées en indigestes
bourrages de crâne, cependant que, de l'autre côté des fenêtres grises de
l'école sombre, le papillon futile lutine la frêle papillonne dont le cri de
joie fait frémir le gazon tendre où perle encore la rosée, fragile et discret
témoin de la jouissance émue jaillissant des humus à l'aune printanière.
n
national-socialisme n. m., Doctrine fondée par Adolf Hitler pendant les années
folles. En abrégé, on dira plus volontiers "nazisme", c'est plus
joli.
Le nazisme, tombé en désuétude en 1945 ― excellente année pour
les bordeaux rouges, encore qu'on puisse lui préférer 1947 ―, prônait le
racisme, le militarisme, le progrès social et l'assiduité aux carnavals
métalliques avec flambeaux et oriflammes à grelots.
Décidés à étendre le territoire allemand au nom de la théorie de
l'espace vital, les nationaux-socialistes (en abrégé on dira plus volontiers
"nazis", c'est plus pimpant) avaient cru remarquer accessoirement que
la race germanique engendrait des surhommes beaux, grands, blonds, sobres en
humour et élégamment bornés. Forts de quoi, ils s'obstinèrent pendant des
années à exterminer les petits bruns dont certains véhiculaient sournoisement
le virus du coryza, voire un atavisme austro polonais douteux ou une
prédilection suspecte pour la carpe farcie et les poivrons à l'huile.
Pour attirer les petits bruns, les nazis avaient imaginé de les
emmener à la campagne dans des bungalows de bois relativement frustes, au cœur
d'immenses clubs privés très bien protégés des curieux par des gardes
assermentés et leurs chiens, de race également.
Pour atténuer les souffrances des petits bruns finissants, les
nazis les endormaient au gaz avant de les empiler dans la cour. Contrairement à
la rage, le nazisme n'est pas remboursé par la Sécurité sociale. Il est
pourtant contagieux. Sa prévention passe obligatoirement par le respect des
synagogues, le mépris de la mitraille et un minimum de réceptivité cordiale au
chant plaintif des violons tziganes.
o
oeil n. m. du latin oculus.
Pluriel : des yeux (un seuil, des cieux ; un deuil, des dieux ; un œil, des
yeux).
L'œil est à la vue ce que l'humanité est au parti communiste :
c'est son organe central.
L'œil est un outil merveilleux. C'est grâce à lui que l'homme
peut, en un instant, reconnaitre à coup sûr une langoustine d'un autobus, ce
qui lui confère évidemment un immense sentiment de puissance sur la nature. La
preuve en est qu'un homme privé de ses yeux se met instantanément à raser les
murs honteusement.
Un homme privé de ses yeux s'appelle un aveugle, dans le langage
populaire, ou un non-voyant, dans le dialecte des politicards populistes
gluants.
Les aveugles sont parfois ridicules. On en a vue manger des
autobus et voyager en langoustine. Pour ne rien arranger, les aveugles lisent
en braillant, au risque de réveiller les sourds.
L'œil se compose essentiellement de l'iris, lui-même percé en
son centre de la pupille. Contrairement à la pupille de la nation, la pupille
de l'œil peur se refermer sur elle-même ou s'agrandir à tout moment, sans
autorisation spéciale des pouvoirs publics, même dans les pays totalitaires :
on cite le cas de plusieurs dizaines de milliers de pupilles s'agrandissant
d'effroi en toute liberté, en Union soviétique et au Chili notamment. Le fond
de l'œil est tapissé de la rétine sur laquelle se forment des objets tels que
langoustine, autobus, etc. dont l'encéphale, qui a oublié d'être con,
enregistrera la perception grâce au nerf optique.
L'œil humain est une mécanique merveilleuse dont la réussite
parfaite nous conforte dans notre foi en Dieu. On regrettera seulement que
l'œil du cochon d'Inde ou du verrat périgourdin bénéficient de la même géniale
complexité. C'est vexant, même à Périgueux.
Les principales anomalies de l'œil sont : la myopie, qu'on
corrige à l'aide de verres divergents; l'hypermétropie, qu'on corrige par le
port de verres convergents ; le strabisme, qui prête à rire ; et la cyclopie,
qu'on corrige par le port du monocle.
L'œil est capable du clin. Le clin est la base même de la
spécificité de l'œil. Il n'existe pas, en effet, de clin d'oreille, ni de clin
de nez. Le clin d'œil sert à marquer subrepticement une complicité tacite entre
deux ou plusieurs chenapans. Il permet aussi au dragueur de se faire connaître
avec une relative retenue et une certaine discrétion qu'on ne retrouve pas la
main au panier.
L'œil du sourd est normal.
p
pangolin n.m., du malais panggoling, qui signifie approximativement
pangolin. Mammifère édenté d'Afrique et d'Asie couvert d'écaille cornées, se
nourrissant de fourmis et de termites.
Le pangolin mesure environ un mètre. Sa femelle s'appelle la
pangoline. Elle ne donne le jour qu'à un seul petit à la fois, qui s'appelle
Toto.
Le pangolin ressemble à un artichaut à l'envers avec des pattes,
prolongé d'une queue à la vue de laquelle on se prend à penser qu'en effet, le
ridicule ne tue plus.
q
quadrumaneadj. etn. m., de quadru, quatre, et manus, main.
Qui a quatre mains. Exemple : le rossignol n'est pas quadrumane.
r
rouquin,e adj. et n. Fam. : qui a les cheveux roux. Le
rouquin est un mammifère vivipare omnivore assez voisin du blondinet. Pas trop
voisin quand même, car le blondinet fuit le rouquin dont on nous dit qu'il pue,
qu'il est la honte de l'espèce, le banni pestilentiel au regard faux sous un
sourcil rouille. Méfions-nous des jugements hâtifs : la femelle du rouquin
n'est pas la rouquine. Aussi vrai que celle de coquin n'est pas la coquine. Ou
alors si, mais pas forcément. En règle générale, nous dirons que la coquine
sied mieux au rouquin, et la rouquine au coquin, que la coquine au coquin ou la
rouquine au rouquin.
Parmi les différents types de rouquins, le rouquin cul-de-jatte
est le plus défavorisé. A l'instar du manchot qui louche, le rouquin
cul-de-jatte prête à rire doublement.
Passé la cinquantaine, le rouquin risque de perdre ses cheveux,
soit par le simple effet du temps qui passe, soit à la suite d'un traitement
anticancéreux généralement inutile, mais toujours à la mode chez les mondains
de Villejuif. Dans un cas comme dans l'autre, il serait presque impossible
alors de reconnaître un rouquin d'un homme normal, n'étaient-ce les tâches de
rousseur que Dieu inventa au soir du Premier Jour, alors qu'il secouait ses
pinceaux sans malice après avoir créé le premier crépuscule flamboyant à
l'ouest d'Eden.
s
sens n.m., du latin sensus.
Faculté par laquelle un organisme vivant ― plante, animal, directeur de la
maison de la Culture de Sarcelles-Lochères, etc. ― est renseigné sur certains
éléments du milieu extérieur de nature physique (vue, audition, sensibilité à
la pesanteur, toucher) ou chimique (goût, odorat).
Les organes des sens, chez Gégéne, et, par extension, chez
l'homme en général, sont : la vue, le goût, l'odorat, le toucher et Louis.
La vue est l'organe
des sens le plus important. Il suffit pour s'en convaincre d'observer le
comportement d'un aveugle pendant une exhibition des ballets Moïsseïev : il
maugrée, bougonne, s'impatiente. C'est un être aigri, frustré, peu ouvert à la
facétie : offrez-lui un bilboquet, il se blessera. Mis à part ce qu'il y a à
l'intérieur d'une noix, le voyant, en revanche, peut tout voir, depuis les
brumes du quai du Louvre jusqu'au couchant sur les flèches de Chartres, en
passant par le squelette noir des ruines de Tiffauges, encore qu'en prenant par le périph et l'autoroute A6 ça
gagne pas mal de temps. Ensuite, pour faire Chartres-Tiffauges, voir la carte
Michelin 67. Je crois que c'est 67. Cela dit, Tiffauges, c'est très surfait.
Quelques pans de murs cernés de lierre où trois corbeaux sacerdotaux
s'emmerdent au vent d'ouest, c'est tout ce qu'il reste de ce temps de la démence,
où sept siècles plus tôt, Gilles de Rais le terrible dépeuplait la Vendée en
sodomisant à mort les enfants impubères pour tenter d'effacer le souvenir
brûlant de la Pucelle.
Louis est pas mal non plus. Sans
Louis, comment savoir que c'est le plombier ? Combien de non-entendants
riraient encore à la vie s'ils n'avaient pas fait la sourde oreille et traversé
la ru Royale à l'instant même où leur camarade de promotion hurlait :
"Fais gaffe, voilà le 94" ?
Le sourd le plus célèbre du monde s'appelle Ludwig van
Beethoven. Je le précise à l'intention des jeunes pour qui l'histoire de la
musique commence à Liverpool et finit par buter à la porte de Pantin, Ludwig
van Beethoven fut un compositeur de musique allemand du siècle dernier qui nous
fit, tout de même, trente-deux sonates pour piano, neuf symphonies, pas mal de
quatuors et un ulcère du duodénum auquel il faut attribuer ce douloureux faciès
de cégétiste sous banderole qu'on lui voit dans le triste portrait qu'en brossa
Waldmüller.
Le toucher est le moins
passionnant des cinq sens. Nous nous contenterons de l'effleurer.
L'odorat permet au
parfumeur de survivre à la crise. C'est un sens très prisé des
commissaires-priseurs. Pour l'homme privé d'odorat, le N°5 de Chanel, c'est de
la merde. Au contraire, un odorat raffiné permet à celui qui le possède de
jouir avec une infinie subtilité des senteurs de la vie, car il n'est pas de
jouissance totale qui ne passe par un bon nez (lire à cet égard le chef-d'œuvre
de Mme Sissi Rano de Bergerac, Pif Paf, éditions des Forces nasales).
Le goût, enfin, que
nous avons gardé pour la bonne bouche, c'est bien le moindre hommage à lui
rendre, peut être considéré comme le plus distingué des cinq sens. Au reste, il
fait généralement défaut chez les masses populaires où l'on n'hésite pas à se
priver de caviar pour se goinfrer de topinambours ! On croit rêver !! C'est
pourquoi je fous tout à coup des points d'exclamation partout alors que,
généralement, j'évite ce genre de ponctuation facile dont le dessin bital et
monocouille ne peut qu'heurter la pudeur.
Mêlé à l'odorat le plus fin, le goût le plus délicat fait le
grand sommelier. A l'heure où j'écris ces lignes, et pour longtemps j'espère,
le champion du monde des sommeliers est un Français, M. Jean-Luc Pouteau, qui
est capable, les yeux bandés, de distinguer un margaux 47 d'une bavette aux
échalotes.
t
torture nom commun, trop commun, féminin, mais ce n'est pas de ma
faute. Du latin tortura, action de
tordre.
Bien plus que le costume trois-pièces ou la pince à vélo, c'est
la pratique de la torture qui permet de distinguer à coup sûr l'homme de la
bête.
L'homme est en effet le seul mammifère suffisamment évolué pour
penser à enfoncer des tisonniers dans l'œil d'un lieutenant de vaisseau dans le
seul but de lui faire avouer l'âge du capitaine.
La torture remonte à la nuit des temps. A peine eût-il inventé
le gourdin, que l'homme de Cro-Magnon songeait aussitôt à en foutre un coup sur
la gueule de la femme de Cro-Magnonne qui refusait de lui avouer l'âge de
pierre.
Mais il fallut attendre l'avènement du christianisme pour que la
pratique de la torture atteigne un degré de raffinement enfin digne de notre
civilisation. Avant cet âge d'or, en effet, la plupart des supplices, en
Haute-Egypte et jusqu'à Athènes, relevaient hélas de la plus navrante
vulgarité. Les Spartiates eux-mêmes, au risque d'accentuer la dégradation des
sites, n'hésitaient pas à précipiter leurs collègues de bureau du haut des
falaises lacédémoniennes pour leur faire avouer la recette de la macédoine.
Quant à l'invasion de la Grèce pas les légions romaines, on n'en retiendra que
la sanglante boucherie au cours de laquelle le général Pinochus se fit révéler le théorème de Pythagore en
filant des coups de pelle aux Ponèses.
Pour en revenir aux chrétiens, on n'oubliera pas qu'après avoir
été, sous les Romains, les premières victimes de la torture civilisée, ils en
devinrent les plus sinistres bourreaux pendant l'Inquisition. Aujourd'hui
encore, quand on fait l'inventaire des ustensiles de cuisine que les balaises
du Jésus'fan Club n'hésitaient pas à enfoncer sous les ongles des hérétiques,
ce n'est pas sans une légitime appréhension qu'on va chez sa manucure.
Aux portes de l'an 2000, l'usage de la torture en tant
qu'instrument de gouvernement se porte encore bien, merci. Même si, sous nos
climats, elle a tendance à tomber en désuétude. Pour citer un pays occidental,
au hasard, nous sommes en mesure d'affirmer qu'à Monaco, par exemple, le nombre
des bourreaux par habitant est actuellement de zéro pour mille. D'ailleurs, on
voit mal quelles raisons pourraient pousser un croupier à empaler un
milliardaire.
Hélas, quand on s'écarte un peu plus de l'Hexagone, que ce soit
vers l'ouest, vers l'est ou vers le sud, on rencontre encore, dans des contrées
exotiques pourtant ouvertes au progrès, à trois pas de la piscine du Hilton, ou
dans les steppes démocratiques les plus populaires, des empêcheurs de penser en
rond qui cognent et qui charcutent, qui enferment et qui massacrent, qui
souillent et qui avilissent, et même ― ah, les cons ! ― qui arrachent les ailes
des poètes au nom de l'avenir de l'homme.
u
uropygienne adj. f., du grec oura,
queue, et pugê, fesse. Se dit d'une glande graisseuse qui se trouve au croupion
des oiseaux, et dont la sécrétion sert à graisser les plumes.
Est-il plus plaisant spectacle que celui du cygne sauvage
s'escagassant le fion d'un bec fouineur sur l'étang brumeux que le soleil
levant redore au clair matin ! Croyez-vous que ce fringant palmipède se titille ainsi le sphincter dans l'espoir de
quelque orgasme à plumes ? ou bien qu'il s'ébroue la houppette pour en chasser
les poux d'eau qui s'accrochent à son duvet pour en sucer le moelle du penne *
?
Eh bien non ! Si notre cygne matinal se colle si joliment le nez
au cul, c'est pour y ponctionner, sur le pourtour suintant de sa glande
uropygienne, la grosse graisse grasse grise dont il enduira d'un bec sûr et
léger son plumage éclatant que le soleil levant redore, au clair matin
également. Ainsi oint, Coincoin pourra glisser sur l'onde avec cette grâce
exquise qui n'existe pour ainsi dire pas chez le tuyau de plomb, et cela à
l'abri du rhume de canard, si courant pendant le froid du même nom, et sans
risquer de couler. Ce qui est fort important. C'est à sa parfaite
insubmersibilité que le cygne sauvage doit sa légitime arrogance. Ce serait
aussi grotesque qu'un pape pétant au balcon un jour de Pâques. Dieu nous
épargne semblables incongruités. Merci, Mon Dieu. Caeli enarrant gloriam tuam.
Pour en revenir au trou du cul, évitons la grossière erreur,
courante chez les gens du peuple, qui confondent souvent l'uropygienne et la
caroncule, au risque de se ridiculiser dans les soirées mondaines où, Dieu
encore merci, on ne les convie guère. La caroncule, qu'on se le dise, est à
l'autre bout de l'oiseau, puisqu'il s'agit de ce machin ridicule que le dindon
se laisse pendre sous le cou pour essayer d'avoir l'air plus con que le paon.
Lequel criaille. Alors que le dindon glougloute. Parfaitement. Le dindon
glougloute. C'est la poule qui glousse. Plus précisément, elle glousse pour
appeler ses petits. Quand elle échange des idées d'ordre général avec sa
camarade de poulailler, ou qu'elle est sur le point de pondre, on dit qu'elle
caquette. Alors que l'oie, non. L'oie cacarde. Pas le jars. Le jars jargonne.
Alexandre Vialatte ajouterait que la caille carcouille, la huppe pullule et le
loup glapit. C'était un homme fort cultivé, d'une prose infiniment élégante,
d'un humour plus subtil, plus tendre et plus désespéré qu'un la mineur final
dans un rondo de Satie. Alors que, pour en finir avec la basse-cour, les oiseaux
porteraient plutôt l'intellect au ras de la glande uropygienne. Ce n'est pas
Chaval qui me contredira.
* Riche en azote
et en sels minéraux.
v
vélo n. m abrév. De
vélocipède, du latin velox, rapide, et pes, pedis, pied. Véhicule à deux roues
dont la roue arrière est actionnée par un système de pédales agissant sur une
chaîne. Une erreur courante consiste à penser que le vélo est le mari de la
bicyclette. C'est faux. C'est son amant.
A l'origine, le vélocipède était formé de deux roues de
diamètres différents : la grande roue à l'avant, la petite à l'arrière, parce
que si Jean-Sébastien Vélocipède, l'inventeur, avait fait le contraire, il se
serait cassé la gueule à peine hissé sur sa selle.
Dix ans après l'invention du vélo, le jeune Paul-Emile
Bicyclette commet une erreur invraisemblable à la chaîne : il assemble deux
grandes roues sur la même machine, et deux petites sur une autre, créant ainsi,
tout à fait par hasard, ces deux grands chefs-d'œuvre du génie humain : le
grand vélo et le petit vélo. D'où l'expression désormais courante : "avoir
un petit vélo" qui désigne le plus souvent les gens que mélangent les
pédales.
Tombé en désuétude, en tant que moyen utilitaire de locomotion,
depuis l'avènement de Concorde qui permet de rallier New York à Paris sans
s'encombrer de boyau de rechange ou de bidons disgracieux,, le vélo est encore
utilisé de nos jours à des joutes sportives très connues dans nos régions sous
le nom de "courses de vélo".
Encore peu encline aux joies du golf et toujours fermée aux
émois de l'aquaplane, la masse est très friande de ces courses de vélo, dont la
plus célèbre est le "Tour de France". Créé en 1904 par Vasille
Vasilliu Vasidon Vasimimile, le Tour de France rassemble chaque été, sur le
bord des routes, des centaines de milliers de prolétaires cuits à point qui
s'esbaudissent et s'époumonent au passage de maints furonculés tricotant des
gambettes. Dans les côtes, ces jeunes effrénés pédalent la tête plus bas que
cul, ce qui leur permet de se gnougnouter l'uropygienne sans risquer de
torticolis. Voilà pourquoi les coureurs cyclistes ont si souvent le cheveu
gominé.
w
whisky n. m (mot anglais
emprunté à l'irlandais). Eau-de-vie de grain que l'on fabrique surtout en
Ecosse et aux Etats-Unis.
Le whisky est le cognac du con.
Son bouquet évoque la salle d'emboîtage des vaccins antigrippaux
de l'institut Mérieux. Additionné d'au gazeuse, il insulte le palais de l'homme
de goût qu'il éclabousse d'inopportune salaison et de bulles que le Champenois
crache au noroît dans son mépris d'Albion.
En vieillissant, le whisky gagne en platitude ce qu'il perd en
infamie. On peut y conserver ses bébés morts en bas Armagnac.
x
xiphophore n. m du grec xiphos, épée, et phoros, qui porte. (A ne pas confondre avec senestrophore, du grec phoros, qui porte et du latin sinister, à gauche.)
Le xiphophore est un petit poisson de coloration variée, de six
à dix centimètres de long, originaire du Mexique, très fécond, et qu'on trouve
fréquemment dans les aquariums, à condition de le mettre dedans. Le mâle a la
queue pointue, d'où son nom.
Le xiphophore porte à son cou, en souvenir de toi, ce soupir de
soie qui n'appartient qu'à nous. Ce n'est pas qu'il fasse froid, le fond le
l'air est doux : c'est une nageoire ventrale qui lui permet de se tenir
immobile entre deux eaux pour faire la siesta. Comme la plupart des poissons,
le xiphophore affiche en permanence une expression béate. C'est parce qu'il
baise dans l'eau, comme Adolph Hitler ou Ludwig von Beethoven, affichent
volontiers un air revêche.
Au moment de se reproduire, le xiphophore émet un cri strident :
" Christiane ! " pour appeler la xiphophorette qui accourt bientôt
ventre à flotte, la caudale en feu. S'ensuit alors une danse d'amour effrénée
dont le tendre spectacle ne peut que toucher le cœur de tout homme capable de
supporter un documentaire écologique marin sans balancer ensuite une grenade
offensive dans le lac d'Enghien.
y
ysopet n. m., du latin ysopetus (ysopetae, ysopetam, ysopetorum). Nom donné, au Moyen Age, à
des fables ou recueils de fables imitées ou non d'Esope : les ysopets d'Anne de
Beaugency, de Charles de Brabant, de Zézette d'Orléans sont parmi les plus
célèbres.
Avec cet effroyable cynisme d'emperruqué mondain qui le
caractérise, La Fontaine n'hésita pas à puiser largement dans les ysopets des
autres pour les parodier grossièrement et les signer de son nom. Grâce à quoi,
de nos jours encore, ce cuistre indélicat passe encore pour un authentique
poète, voire pour un fin moraliste, alors qu'il ne fut qu'un pilleur d'idées
sans scrupule, doublé d'un courtisan lèche-cul craquant des vertèbres et
lumbagoté de partout à force de serviles courbettes et honteux léchages
d'escarpins dans les boudoirs archiducaux où sa veulerie plate lui assura le
gîte, le couvert et la baisouillette jusqu'à ce jour de 1695 où, sur un lit
d'hôpital, le rat, la belette et le petit lapin lui broutèrent les nougats
jusqu'à ce que mort s'ensuive, ce qui prouve qu'on a souvent besoin d'un plus
petit qui soi. Essayez de vous brouter vous-même les nougats, vous verrez que
j'ai raison.
z
zeugma n. m (mot grec signifiant
réunion). Procédé tordu qui consiste
à rattacher grammaticalement deux ou plusieurs noms à un adjectif ou à un verbe
qui, logiquement, ne se rapporte qu'à l'un des noms. Suis-je clair ? Non ? Bon.
Exemple de zeugma : " En achevant ces mots, Damoclès tira
de sa poitrine un soupir et de sa redingote une enveloppe jaune et salie "
(André Gide). C'était un zeugma.
En voici un autre : " Prenant son courage à deux mains et
sa Winchester dans l'autre, John Kennedy se tira une balle dans la bouche
". (Richard Nixon, J'ai tout vu, j'y
étais).
Plus périlleux, le double zeugma : " Après avoir sauté sa
belle-sœur et le repas du midi, le Petit Prince reprit enfin ses esprits et une
banane " (Saint Éxupéry, Ça creuse).
Tel est le zeugma. Il était bon, ami lecteur, que tu le susses.
Oh certes, on peut très bien vivre sans connaître la signification du zeugma.
Une récente statistique nous apprend que plus de quatre-vingt-quinze pour cent
des mineurs lorrains ignorent totalement ce qu'est un zeugma ! ! Est-ce que
cela les empêche d'aller au charbon en sifflotant gaiement laMarche Turque ? Mais
introduisez maintenant l'un de ces mêmes mineurs dans un salon mondain, et
branchez la conversation sur le zeugma : qui a l'air con ? C'est le merle des corons, avec ses gros
doigts noirs sur la flûte à champagne. Il ne lui restera plus qu'à filer en
tâchant de reprendre sa dignité et sa pioche dans le porte-parapluie, et de
réintégrer son HLM horizontal en sifflant tristement le final de l'Œdipus Rex de Stravinski.
A
Afrique, célèbre continent en
forme de pomme de terre nouvelle.
La superficie de l'Afrique impose le respect. A part l'Amérique,
l'Asie, l'Europe et, à moindre titre, l'Océanie, peu de continents peuvent se
vanter d'être aussi vastes.
Au nord, l'Afrique est peuplée de chèvres, appelées biques, et
d'Arabes, appelés également biques, mais de loin, car certains sont
susceptibles.
Les Arabes, fréquemment mâtinés de Berbères, forment un peuple
fier et orgueilleux avec un tapie sur l'épaule. Els envahirent la France bien
avant le mildiou, mais furent arrêtés à moitié dans le Poitou. Nous leur devons
les chiffres arabes, le chewing-gum arabique et la virilité glacée de nos tours
sarrasines.
Au sud, l'Afrique est peuplée de Noirs qui répondent au nom de
"Mamadou", sauf au Sahel où ils ne répondent rien du tout, à cause du
sable dans les oreilles et de l'intolérable souffrance irradiant sans trêve
leur paroi stomacale desséchée par la faim atroce et palpitante qui les raye un
à un de la carte du monde dans l'indifférence placide des nantis du Nord
assoupis dans leurs excès de mauvaises graisses.
Les Noirs ont le rythme dans la peau, la peau sur les os et les
os dans le nez. Peu doués pour la planche à voile, le ski de fond, le
marchandising et la bourrée poitevine, le Noir moyen, à sa naissance, présente
peu de chances de devenir un jour président des Etats Unis. Pour l'y aider néanmoins,
'homme blanc, reprenant à son compte une vieille coutume appelée esclavage,
l'envoya gratuitement en Amérique où il fit merveille dans les plantations de
coton. Au début les Américains ne virent dans l'homme noir qu'un grand enfant,
mais , peu à peu, ils durent se rendre à l'évidence : c'était également un
excellent appât pour la chasse à l'alligator.
Après une brutale interdiction légale de l'esclavage, l'Afrique
put lutter efficacement contre sa terrible dépopulation grâce à la
colonisation. Pionniers superbes, les hardis colons n'hésitèrent pas combattre
la mouche tsé-tsé à mains nues et le paludisme à coup de trique, tout en encourageant
la natalité en violant eux-mêmes les femmes noires. Après la colonisation, les
Noirs connurent une terribles mais courte période de torpeur. Puis, reprenant
du poil de la bête, ils colonisèrent eux-mêmes.
Quand un Blanc dit qu'un Noir est un con, on dit que le Blanc
est raciste. Quand un Noir dit qu'un Blanc est un con, on dit que le Blanc est
un con. Ce en quoi l'on a tort. On peut très bien être noir et con. Sauf en
Afrique du Sud ou seuls les Blancs sont cons. A part Ted.
Les principales ressources de l'Afrique sont l'arachide, plus
communément appelée cacahuète; le cuivre, dont on fait les planches à voile
submersibles; les diamants, qui clignotent aux phalanges boudinées des charcutières; les
lions royaux, qui nous enfermons dans nos cages afin que les enfants
d'imbéciles viennent en gloussant les voir mourir d'ennui; le cacao, et si peu
d'endives que cela ne vaut pas la peine d'en parler.
L'Afrique est le continent des vacances. Au Nord, il n'est pas
rare d'y rencontrer, d'avril à novembre, des tas de congrétistes bigarrés et de
pimpants piliers de comité d'entreprise, marchandant âprement les immondices en
terre cuite qui décoreront désespérément le dessus de leur téléviseur. A
l'Ouest, plus bas, donc plus cher, le sombre cadre supérieur, l'obtuse attachée
de fesses, le bellâtre creux des créatifs publicitaires, tout ce que l'Europe
molle compte de petits nantis, bronzent frénétiquement en février dans l'espoir
d'épater en mars d'autres immuables crétins bureaucratiques, aussi cons certes,
mais plus pâles. A l'Est, encore plu bas, encore plus cher, le président déchu,
l'écrivain alcoolique, le roi du show-biz bottés, casqués, bazookés, couperosés
d'importance, posent sans grâce au-dessus du cadavre fragile de la gazelle, ou
près du rhinocéros abattu dont la corne, arrachée au cuir, s'ira planter
au-dessus de la cheminée du manoir, mandrin terrible et luisant que la
bourgeoise au foyer astiquera sans malice en murmurant du Brahms.
B
Bastille (la) célèbre forteresse construite à Paris, à la porte
Saint-Antoine, entre 1370 et 1382.
Ce fu d'abord une citadelle d'où les militaires aimaient
s'entretuer, mais c'est en tant que prison d'Etat qu'elle commença à connaître
une notoriété que lui envient, aujourd'hui encore, bien des maisons d'arrêt
pourtant cotées au hit-parade des QHS.
Le plus célèbre prisonnier de la Bastille fut évidemment
Voltaire. Le moins célèbre fut Jean-Paul Petit-Boudu : moi-même, je ne sais pas
qui c'est. C'est vous dire.
Bernard Palissy mourut à la Bastille en 1589, dans d'atroces
souffrances morales. Il avait été enfermé à cause de sa foi huguenote qui le
faisait douter du dogme de l'Immaculée Conception, se gausser du culte des
saints, et boycotter crânement les processions du 15 août. A une époque où le
protestantisme était aussi violemment combattu que la peste noire ou le
judaïsme, c'était de la provocation. Avant de rendre l'âme, Bernard Palissy,
avec un lyrisme et une richesse de style surprenants chez un antipapiste,
décrivit brillamment sa propre agonie dans un petit livre intitulé : Palissy : la sortie.
Nicolas Fouquet, vicomte de Vaux et surintendant des Finances
royales, supporta mieux l'humidité glacée des cachots de la Bastille et
l'humour, également glacé, de ses gardiens. Au point que Louis XIV dut le transférer
à la citadelle de Pignerol où le prisonnier daignéé enfin trépasser, les
chevilles, naguère enflées par la gloire, broutées par des hordes de rats
piémontais insensibles au charme trouble de cet homme d'élite qui sut toute sa
vie rester beau sans cesser d'être fonctionnaire.
On le regrettera plus que cette salope de Marie-Madeleine. Je ne
fais ici allusion à la groupie fesses-au-vent de Notre Seigneur, mais, bien
sûr, à la cynique Marie-Madeleine, ci-devant marquise de Brinvilliers, qu'on
embastilla longuement avant de la brûler en place de Grève. Cette femme, qui
assassina maintes honnêtes gens en leur faisant avaler des mixtures qu'on
n'oserait pas servir dans une pizzeria des Champs-Elysées, ne mérite ni notre
attention ni même un détour dans le Michelin.
Latude (Jean-Henri de), aventurier méridional et champion de
l'évasion, passa trente-cinq ans en prison, dont pas mal à la Bastille. Il
s'était attiré les foudres royales à force de comploter contre la Pompadour, ce
qui était de fort mauvais goût, surtout sous Louis XV. Le folklore français
voit aujourd'hui encore un Latude une espèce de héros jovial et pétaradant.
Cela est bien dans l'esprit de notre peuple, très épris de fanfaronnades, de
franchouillardises, de risquouillettes, d'escroqueries au portillon, de
fricotinages et de belmonderies. En réalité, Latude était un malade mental :
chaque fois qu'il réussissait à s'évader, il allait chez lui et n'en bougeait
plus, l'envie de sortir totalement brisée à la seule idée que la porte était
ouverte.
Voltaire connut bien les geôles de la Bastille à une époque où,
sauf son respect, il avait encore des couilles au cul : par la suite, fort nous
est d'admettre qu'il se plia devant les puissants, et singulièrement devant
Frédéric II de Prusse, en périlleuses et dégradantes courbettes d'une servilité
qu'on ne rencontre plus guère, de nos jours, que chez les producteurs de
télévision vautrés au paillasson des directeurs de chaîne. On notera pour
l'anecdote que Voltaire inventa son fauteuil, sur les conseils de son camarade
de cellule, Gérard Abascule, qui avait perdu son siège à l'Assemblée dans les
conditions douteuses que l'on sait. La promiscuité du Faubourg Saint-Antoine, aujourd'hui
encore quartier du meuble, compta évidemment pour beaucoup dans cette éclosion
de talent ébénistique à la Bastille.
Terminons en rappelant que la Bastille était quasiment vide
lorsqu'une brassée d'excités la prit vaillamment d'assaut un jour d'été 1789.
C'était la révolution des bourgeois.
Ils sont encore au pouvoir.
C
Cannes (06400), chef-lieu de
canton des Alpes-Maritimes (arrondissement de Grasse). 71 247 habitants en
comptant les femmes et les juifs. Haut lieu du tourisme balnéaire
international, célèbre pour sa croisette bordée de palmiers et pleine de connes
emperlousées traînant des chihuahas. Cannes brille surtout pour son festival
annuel du cinéma où les plus notables représentants de la sottise
journalistique parasitaire côtoient les plus éminentes incompétences
artistiques internationales, entre deux haies de barrières métalliques où
sinistrement empingouinés, le havane en rut ou la glande mammaire au vent,
pressés, tassés, coincés, luisants comme des veaux récupérés qu'on pousse à
l'abattoir, tous ces humanoïdes chaleureusement surgelés se piétinent en meuglant
sous les brames effrayants des hordes populaires. Hormis le congrès annuel des
garçons de bain cégétistes et les soirées gourmettes chez Régine, peu de
réunions mondaines laissent suinter autant de vulgarité.
Mais Cannes n'est pas seulement le paradis des pellicules. A s'y
promener l'hiver, on s'aperçoit bientôt qu'elle forme, avec Nice sa voisine,
l'un des plus grands mouroirs à rupins du monde. Au moindre rayon de soleil,
vieux poussins frileux, ils s'extraient en tremblant de leur béton cossu,
odieusement pomponnés en yachtmen ou en princesses des mille et une rides.
Doucement, à petits pas, ces fossiles dorés s'en vont moirer encore le cuir
fripé brun caca de leur vieille tête aux traits déjà morts à force de
chirurgie, de lassitude et d'ennui confortable. Sur le coup de midi, ils iront
chipoter du groin au-dessus d'un homard, avant de se recroqueviller sur leur
coussin d'or pour une sieste agitée de remords tardifs et de renvois de sauce
rouille. Puis, si le crépuscule est tiède, trottineront vers le port de
plaisance pour aller caresser leur bateau à moteur en acajou super Barbès d'où
ils ne partiront plus jamais debout, mais sur le pont duquel, quand le temps
reste clair, ils s'appuient encore aux haubans, leur nez refait pointé vers Dieu
pour lui demander s'il existe.
D
Douaumont (55100), commune de la Meuse (arrondissement de Verdun), sur les Hauts
de Meuse.
Point fort de la défense de Verdun, théâtre de violents combats
en 1916.
L'ossuaire de Douaumont est très joli. Il contient les restes de
300 000 jeunes gens. Si l'on mettait bout à bout tous les humérus et tous les
fémurs de ces garçons et leurs 300 000 crânes par-dessus, on obtiendrait une
ravissante barrière blanche de 2 476 kilomètres pour embellir le côté gauche de
la route Moscou-Paris.
Le sacrifice des 300 000 morts de Douaumont n'a pas été vain.
Sans Verdun, on n'aurait jamais abouti à l'armistice de 1918, grâce auquel
l'Allemagne humiliée a pu se retrouver dans Hitler. Hitler sans lequel on
n'aurait jamais eu l'idée, en 1945, de couper l'Europe en deux de façon assez
subtile pour que la Troisième soit désormais inévitable.
E
Eluard (Christian,
Baptiste, Paul), dit Cricri. Fils caché de
Paul, Cricri Eluard doit aujourd'hui encore à la notoriété de son père d'être
resté dans l'ombre, bien qu'il habite Nice, plein sud, face au goudron.
Elevé au sein par une nourrice dubitative qu'il tétait
d'ailleurs de droite et de gauche, Cricri Eluard voulut dès son plus jeune âge
se séparer de l'étiquette surréalisto-communiste attachée au nom paternel et
n'a jamais montré qu'un intérêt poli envers le martyre, le don de soi, le
sacrifice au drapeau et les beuveries cosmopolites populacières des
anniversaires du Débarquement.
Des écrits de Cricri, peu méritent d'être cités dans le présent
ouvrage. Nous leur préférons cette admirable page de Paul Eluard. Ami lecteur,
si tu la connais, tu m'arrêtes.
Sur le collier du chien que tu laisses au mois d'août
Sur la vulgarité de tes concours de pets
Sur l'étendard nazi et sur le drapeau rouge
Sur la rosette au coin du vieillard officiel
Sur les blousons kaki, sur les képis dorés
Sur le cul blanc des féministes
Sur le mandrin des misogynes
Sur le béret obtus des chauvins aveuglés
Sur la croix des cathos, le croâ des athées
Sur tous les bulletins et sur toutes les urnes
Où les crétins votants vont se faire entuber
Sur l'espoir en la gauche
Sur la gourmette en or de mon coiffeur de droite
Sur la couenne des connes aplaties sur les plages
Sur l'asphalte encombré de cercueils à roulettes
Sur les flancs blancs d'acier des bombes à neutron
Que tu t'offres à prix d'or sur tes impôts forcés
Sur la sébile humiliante et dérisoire
Qu'il faut tendre pourtant à tous les carrefours
Pour aider à freiner l'ardeur des métastases
Sur le mur de la honte et sur les barbelés
Sur les fronts dégarnis des commémorateurs
Pleurant au cimetière qu'ils ont eux-mêmes empli
Sur le petit écran qui bave encore plus blanc
Sur l'encéphalogramme éternellement plat
Des musclés, des Miss France et des publicitaires
Sur l'étendard vainqueur de la médiocrité
Qui flotte sur les ondes hélas abandonnées
!aux moins méritants des handicapés mentaux
Sur la Bible et sur Mein
Kampf
Sur le Coran frénétique
Sur le missel des marxistes
Sur les choux-fleurs en trop balancés aux ordures
Quand les enfants d'Afrique écartelés de faim
Savent que tu t'empiffres à mourir éclaté
Sur le nuage
Sur la lune
Sur le soleil atomique
Sur le cahier d'écolier de mes enfants irradiés
J'écris ton nom
HOMME.
F
François prénom masculin, signifiant littéralement : " Mon Dieu,
quel imbécile ! " ; du celte fran
(" mon Dieu ") et cois
(" quel imbécile" ! ).
En effet, tous les gens qui s'appellent François sont des
imbéciles, sauf François Cavanna, l'écrivain, François Chatelet, le philosophe,
et François Cusey, de chez Citroën, qui a honoré l'auteur de son amitié pendant
leur incarcération commune au dix-huitième régiment des Transmissions à Epinal.
Tous les François sont des imbéciles. La preuve en est que, lorsqu'ils croisent
un imbécile, certains l'appellent François.
Le plus souvent, l'ambition, pour ne pas dire l'arrivisme, des
François, est à la mesure de leur imbécillité, bien que je n'arrive pas à me
faire à l'idée qu'il y ait deux "l" à l'imbécillité alors qu'imbécile
n'en prend qu'un. Dura lex, mais bon.
Quand ils sentent le vent tourner, grâce à leur instinct
d'imbécile, les François n'hésitent pas à s'engager dans le Résistance en 43,
44, 45, voire, pour les plus sots, en 46. Grâce à la longueur de leurs crocs,
qui laissent des traces sur les moquettes ministérielles où ils plient l'échine
jusqu'à ramper pour obtenir la moindre poussière de pouvoir, les François
peuvent espérer se hisser un jour sur le plus élevé des trônes, celui du haut
duquel, dans l'ivresse euphorique des cimes essentielles, l'imbécile oublie
enfin qu'il est posé sur son cul. Alors, serein, benoît, chafouin, plus
cauteleux que son hermine et plus faux que Loyola, il entraîne paisiblement le
royaume à la ruine, en souriant comme un imbécile.
G
Gaulle (Charles de) , général et homme d'Etat français né à Lille (1890 – 1970).
Né dans une famille pauvre mais digne, noble mais propre,
Charles de Gaulle fut élevé dans l'amour de la patrie, le respect du drapeau,
la dévotion à Jeanne d'Arc et la foi en Dieu sans qui l'oiseau qui trille, le
ruisseau qui chante et le cancer qui ronge n'existeraient pas.
Bon élève, bon camarade, Charles souffre dès l'enfance d'une
timidité presque maladive, due sans doute à son aspect physique étonnant. A
douze ans, il est déjà grand comme une planche à voile, avec de beaux yeux
lourds d'épagneul déçu, un menton fuyant les mondanités sous une bouche d'une
tristesse de Chopin surmontée d'un nez plus grand que mon interphone.
En 1913, au bal des Petis-Lillois, cet appendice nasal
considérable fait forte impression sur la jeune et belle Yvonne de Taizon
Nozémois qui avait ouï-dire que plus un homme avait le nez long, plus longue
était son espérance de vie.
Elle l'épouse à Saint-Mauroy, c'est la joie, et la guerre de 14
peut commencer.
Charles brille au feu, à cause, diront les mauvaises langues, de
son nez. Il n'en est rien. Le 20 mars 1917, à Verdun, l'épée au poing, il prend
seul d'assaut un poste ennemi, faisant 14 prisonniers. Plus tard, dans ses
mémoires, le chef de poste prussien, encore ébloui par ce fait d'armes, écrira
: "Ach !" Le lendemain, 21 mars, c'est le printemps. Philippe Pétain,
pas encore maréchal mais déjà con, décerne au colonel de Gaulle la médaille de
bronze du lancer du javelot. Charles est décoré par Roche et Bobois. C'est la
joie, et la guerre de 14 peut continuer.
Après l'armistice, comme tous les militaires quand ils n'ont
personne à tuer, Charles s'emmerde. Fort de son expérience au front, et très
inquiet de l'ampleur du réarmement métallique allemand, il met en garde ses
supérieurs dans un livet intitulé Au fil
de l'épée qui fera pouffer le général Gamelin, futur commandant en chef des
Forces françaises de septembre 39 à juin 40, période au cours de laquelle il
fit preuve d'une si considérable inefficacité stratégique qu'il n'a même pas sa
photo dans le Larousse.
Le 16 juin 1940, à midi, il fait 27° à l'ombre à Paris. Ecœuré,
de Gaulle gagne l'Angleterre le 17.
Le 18 juin, d'un bureau climatisé de la BBC , il lance l'appel du même nom, au
terme duquel il demande aux Français de résister à la chaleur en allant
batifoler dans les sous-bois jusqu'à ce que ça fraichisse.
Le 6 juin 1944, enfin, le thermomètre n'affiche plus que 13° à
six heures du matin. On peut faire du bateau au bord des plages normandes sans
risquer l'insolation. Ce jour-là, on verra même des Américains (tout de grands
enfants) se baigner tout habillés pour aller pêcher le pruneau de mer.
"Mets une laine", dit Yvonne de Gaulle à son mari, qui
sort pour prendre le pouvoir sous la pluie. Les vivats surexcités de milliers
de cons gelés, fébrilement occupés à retourner leur veste, l'accueillent sur
les Champs-Elysées et renforcent en lui l'idée que les Français sont des veaux.
Ecœuré pour la seconde fois, de Gaulle laisse bientôt ces
bovidés s'entrebrouter sans lui. Le cœur lourd et la déroute sous le bras, il
va vivre à la campagne. C'est là qu'il rédigera, d'un plume étonnamment fine
chez une cigogne de sa corpulence, des livres immenses auprès desquels les
catalogues et les maupassanteries des roitelets d'aujourd'hui font figure de
bouche-vitrine pour la gare Saint-Lazare, départ banlieue.
Le 13 mai 1958, à midi, sur les marches du forum d'Alger, il
fait 31° à l'ombre. Les chevaux et les militaires commencent à piaffer.
"Seul de Gaulle peut nous tirer de là", s'écrie le roi kaki local, au
bord de l'apoplexie insolationniste. Le 18, de Gaulle et les cocus sont au
balcon. Immense et solitaire, face à la foule, les bras et les jambes écartés
en signe de ventilateur, le général – mais vous ai-je seulement dit qu'il était
général ? – lance son fameux "Je vous hais, compris ?".
La foule crie bravo, parce que c'est la foule, et qu'elle est
malentendante, pour ne pas dire sourde, et malcomprenante, pour ne pas dire
sotte. Par la suite, il fera de plus en plus chaud. "Cet homme nous a
trahis", meuglera la foule.
A Paris, cependant, le fond de l'air est frais.
"Mieux vaut un bon petit froid sec qu'une mauvaise petite
pluie fine, mais, tout de même, mets ta laine", dit Yvonne de Gaulle à son
mari qui sort ramasser le pouvoir sous la brise. Il le gardera plus de dix ans.
Puis s'en ira mourir à petits pas forestiers et tombera sur la mousse à grand
fracas de chêne abattu.
Depuis, nous n'avons plus de grand homme, mais des petits qui
grenouillent et sautillent dans l'incompétence qui force le respect.
H
Hélène, princesse grecque, héroïne de l'Iliade, célèbre par sa grande beauté. Elle était si belle que, sur
son passage, les roses rouges des jardins de Troie pleuraient de rage leurs
pétales de sang. Hélène s'en souciait peu. Petite et porcelaine, elle ondulait
pieds nus sur le marbre blanc, les seins pointillant sous la soie trouble, le
cul ferme et décidé, posant sur l'Achéen le regard sacrilège de ses yeux
éméchés. Les hommes d'acier parfois laissaient la guerre pour fondre au feu
terrible de son sourire à bouche ouverte où se lisait estompée l'inoubliable
promesse des plus vibrants paroxysmes.
Hélène état la fille de Léda et de Zeus. Ce dernier, dont la
moralité n'aurait pas résisté à une fouille à la frontière turque, eut recours
au plus odieux des stratagèmes pour séduire Léda.
La sachant coutumière de siestes ombrées au bord du lac
Thermolactos, il n'hésita pas à se transformer en cygne pour aller trompeter de
joie près de la belle assoupie qui, connement ornithophile comme la plupart des
jeunes filles qui ne se sont pas encore fait fienter sur la robe de bal en
flirtant sous les platanes de Cavaillon, commença sans malice à lui lisser le
col. De cette idylle contre-nature, Léda, outre Hélène, eut trois autres
enfants. Clytemnestre, future femme d'Aga bien qu'elle n'eut pas le même nom,
et les impayables duettistes Castor et Pollux, dont la mise sur orbite a formé
la Constellation des Gémeaux.
Quand Léda comprit de quelle bassesse elle avait été victime,
elle entra dans une colère olympique, lapida le cygne à mort et se le servit
confit, entouré de pommes sarladaises revenues dans la graisse de cygne et
garnies de champignons de Pâris.
Cependant, Hélène s'épanouissait à l'ombre des oliviers. Frêle
enfant au rire frais comme un ruisseau d'été, elle sautillait gaiement derrière
les papillons blancs, cheveux au vent et feu au cul. Un jour qu'elle s'effleurait alanguie au pied d'un cyprès,
elle vit passer sur un cheval blanc un très joli roi charmant qui, champêtre et
luxurieux comme on peut l'être au printemps, mit pied à terre mi-clos qui
semblait jouer d'une harpe invisible au creux de ses blondeurs secrètes.
"Bonjour, belle Hélène, je suis Ménélas, et vous trouve émouvante."
Elle savait qu'il avait fondé Sparte et qu'il était monté comme
un âne. Elle lui donna son cœur, ses fesses, trois enfants et l'occasion de
caracoler fièrement devant Troie à quelque temps de là. Offenbach et ses deux
librettistes, qui furent les trois plus grands humoristes du second Empire,
vous raconteraient cela mieux que moi.
I
Indre-et-Loire, département bénéficiant du numéro 37, au sud-ouest du Bassin
parisien, constitué par l'ancienne province de Touraine. Préfecture : Tours ; sous préfecture : Chinon, Loches. 3 arrondissements, 30 cantons, 278 communes, 6158
kilomètres carrés, 438 000 habitants, dont 1 423 mourront bientôt d'un cancer,
au terme d'un calvaire physique et moral auprès duquel celui de Christ au
Golgotha fait figure d'aimable promenade champêtre. Parmi ces 1 423 personnes,
et en accord avec les statistiques formelles du Centre National de la recherche
scientifique, on peut dénombrer d'ores et déjà 78 communistes, 423 catholiques,
1 nègre, 143 femmes trahies dont 1 au seuil même de la chambre nuptial, sur le
paillasson de l'Auberge des Trois-Chasseurs à la Chapelle-sur-Loire et avec la
complicité frénétique d'Arlette Falopiot, dite "l'Epuiseuse", 1 jardinier
désespéré qui faisait pousser des cris dans la plaine saumuroise, 223
gaullistes mous, 29 anciens d'Algérie, 2 avocats blonds, 6 petits enfants
vraiment très beaux, 103 déçus du socialisme mais pas trop, 2 végétariens
hystériques sans enfants parce que c'est de la viande, 1 employé aux écritures
qui a très bien connu Jacques Balutin, 11 absentéistes périodiques pour coryzas
bidon, 2 cheminots retraités dont 1 ancien résistant sous la micheline
Tours-Saumur et 1 responsable du comité d'entreprise de la SNCF très recherché
dans les milieux ferroviaires pour son aptitude à raconter les histoires belges
à la veillée pendant les vacances de la section A du groupe Paul-Thorez au
château de Montsoreau, où il connut d'ailleurs la première alerte, en
l'occurrence une stridente douleur hypogastrique qui pulvérisé son sourire et
le plaqua au manteau de la cheminée Louis XIII en pierre de tuffeau véritable,
au moment même où il allait finir celle du Bruxellois qui en a une tout petite,
4 boulangers dont 1 par vocation, 2 par habitude et 1 par haine du soleil, 2
mercières totalement fermées à l'humour des grandes surfaces, 923 partisants du
retour à la peine de mort et 1 tenancier de pressing maghrébin, pour ne pas
dire un raton laveur.
Deux remarques après l'énoncé de cette liste :
1. Le total annoncé de 1 423 cancéreux
est largement dépassé. Avant de mettre hâtivement en doute les facultés
mathématiques de l'auteur, le lecteur fera bien de songer aux cumuls possibles.
A titre d'exemple, on notera que rien ne s'oppose à ce qu'un communiste soit en
même temps nègre, végétarien et boulanger trahi, pour peu que sa femme soit
blanche et libérale de tendance carnivore anti-fournil et miches à l'air.
2. Aucun vigneron ne figure dans
cette liste de cancéreux tourangeaux. C'est que les vins de Bougueil,
notamment, légers, délicatement framboisés, rouge pivoine au soleil et clairs
en bouche, ne se contentent pas se susciter au palais l'esprit des bords de
Loire. Ce fin nectar constitue en outre un véritable repoussoir à métastases.
Je sais de quoi je parle, ayant toujours en cave un roulement de 300 bouteilles
de bourgueil, je n'ai pratiquement jamais de cancer. D'ailleurs, je n'en aurai
jamais, je suis contre la mort. L'important est de ne pas oublier de boire.
En dehors des cancers qu'elle suggère, somme toute, en assez
petite quantité, si l'on compare ces chiffres à ceux de la mortalité par connerie
pure chez les militaires de carrière, la Touraine fournit des asperges, des escargots
non comestibles et des couchers de soleil sanguins de toute beauté. Pays plats
sans platitude aux routes minces courant dans les vignes et les champs, la
Touraine offre au rêveur à bicyclette des soirs de paix tranquilles presque
insupportables, comme est insupportable la vraie splendeur des roses qui
poussent aux flancs des maisons blanches et basses, parce que les paix
crépusculaires et la beauté des roses ne sont qu'éphémères agonies, demain
matin je dois passer à la banque, le monsieur vient pour le gaz, on va dîner chez
les Bourbier, et j'ai un peu mal là, j'espère que ça ne sera rien.
J
Jaurès (Jean), homme de gauche intelligent et honnête, né à Castres en 1859,
mort à Paris en 1914. Professeur de philosophie au lycée d'Albi dès l'âge de
vingt-cinq ans, il est très aimé de ses élèves auxquels il sait parler de Kant
avec humour, d'une très belle et très forte voix chaleureuse qui va bien avec
sa grosse barbe carrée.
Malgré sa grande propreté morale, il devient député du Tarn. A
la Chambre, son éloquence, sa très grande érudition et l'émouvante sincérité de
son discours social réveillent parfois ses collègues. En 1893, il adhère au
socialisme par conviction (authentique !), et organise l'unité du parti
socialiste dont il devient le chef sans intriguer.
Il fonde l'Humanité,
qui est alors un journal de gauche.
Dans son livre les Preuves,
qu'il publie en 1898, il prend vigoureusement parti pour le capitaine Dreyfus,
par l'effet d'un besoin incontrôlé, instinctif et irrépressible de justice dont
les manifestations ostensibles lui valent le mépris d'une bonne partie de son
électorat prolétaire et petit-bourgeois. Sinon, les enfants l'aiment bien, et il
caresse les têtes des chiens qui passent, même quand il n'y a pas de
photographes de presse autour.
D'une constitution physique très robuste, Jean Jaurès, selon son
médecin personnel, était bâti pour vivre cent cinquante ans. Mais Dieu, dans
son infinie sagesse ne voulut pas que cet homme de bien connût le déshonneur de
voir les néo-socialistes au pouvoir en France dans les années 80. Aussi le
fit-il assassiner en son temps par un imbécile extatique très attaché aux idéaux
guerriers.
K
Kafka (Franz), écrivain tchèque de langue allemande, né à Prague (1883-1924),
auteur de romans (le Procès, le Château), de nouvelles et d'un
journal intime, qui exprime le désespoir de l'homme devant l'absurdité de
l'existence.
Kafka était juif, mais il n'en tirait ni joie ni fierté, ni
honte ni tristesse. En réalité, Kafka ne tirait ne joie ni peine de rien ni
personne. Simplement, il se sentait mal à l'aise depuis ce matin de 1883 où,
alors que tout allait bien pour lui, il est né. Il conçut de cet évènement un
dégoût inexplicable qui ne le quitta qu'au jour de sa mort. Toute sa vie, cet
homme marcha à côté de sa tête. Il avait la vie comme on a le cancer, et se
heurtait aux conformités, tel le cafard enfermé butant au mur sans jamais
trouver la faille au trou noir salvateur.
Il avait le désir d'aimer mais ne savait pas. Souvent lui venait
l'envie de dire : "Bonjour, homme mon frère, mon semblable, mets ta main
sur mon épaule, porte un peu mon chagrin, viens chanter dans ma vie." Mais
quelque chose l'en empêchait, et il disait : "Bonjour, monsieur Odradek.
Espérons qu'il ne va pas pleuvoir."
La nouvelle la plus connue de Kafka – c'est plutôt un roman de
près de cent pages – s'appelle laMétamorphose (Die Verwandlung). Comme l'essentiel de son œuvre, elle a été
traduite en français par Alexandre Vialatte qui est assurément l'un des plus
grands écrivains de ce demi-siècle, ce ne sont pas les trous du cul du nouveau
roman qui me péteront le contraire. En fait, le travail de Vialatte sur les
textes de Kafka ne relève pas seulement de la simple traduction, c'est la même
musique et la même chanson, et c'est normal car ces deux hommes étaient infiniment
semblables, éblouissants d'intelligence, pétris du même humour sombre, l'un et
l'autre perpétuellement en état de réaction lucide contre l'absurdité fondamentale
des guichetiers infernaux de l'administration des âmes. Vialatte avait le
désespoir plus souriant, Kafka la dérision plus maladive, mais ces deux-là
suivaient le même chemin.
En allemand comme en français, laMétamorphose commence
ainsi : "Un matin, au sortir d'un rêve agité, Grégoire Samsa s'éveilla transformé
dans son lit en une véritable vermine. Il était couché sur le dos, un dos dur
comme une cuirasse, et, en levant un peu la tête, il s'aperçut qu'il avait un
ventre brun en forme de voûte, divisée par des nervures arquées. La couverture,
à peine retenue par le sommet de cet édifice, était près de tomber
complètement, et les pattes de Grégoire, pitoyablement minces pour son gros
corps, papillotaient devant ses yeux." Il va sans dire que cette situation
inconfortable sera très mal vécue par Grégoire, jusque-là employé modèle, car
sa métamorphose, en l'empêchant d'aller au bureau, provoquera chez les parents
Samsa une bien compréhensible déception devant l'attitude inconvenante de leur
fils.
Méfiez-vous des contrefaçons. Si vous ne possédez pas à fond la
langue allemande, ne lisez de Kafka que les traductions garanties Vialatte. Les
autres doivent être considérées comme des interprétations libres, aussi loin de
Kafka que les improvisations d'Yvette Horner sont loin des Brandebourgeois.
C'est une tendance qu'on retrouve chez quelques metteurs en scène de théâtre ou
chorégraphes, et qui consiste, faute de talent authentique, à fienter autour
des œuvres de ceux qui en ont, pour se donner l'illusion qu'ils existent.
Exemple : cette traduction de la Métamorphose signée Roland Barques : "Un matin, dans un nid
de scarabées noirs installés sous l'évier de la cuisine des Fournier, 87, rue
de la Marne à Puteaux, l'un de ces coléoptères, au sortir d'un rêve agité,
s'éveilla transformé en employé de la BNP. A la place des élytres, il portait
une chemise "Guy Dormeuil habille les hommes forts" et il tamponnait
des traites à quatre-vingt-dix jours en fredonnant Stranger in the night."
Je dis que trop c'est trop.
L
Larminier (Pierre-Henri), homme de science et chercheur français célèbre pour avoir
vaincu le cancer (1931-1984).
Infirmier dans le service de cancérologie d'un hôpital de la
région parisienne, Larminier devait constater, après de nombreuses observations
et recoupements effectués en 1983 sur plus de deux mille cas que :
1. Les patients venant la
première fois en consultation de cancérologie s'y rendent par leurs propres
moyens, seuls et sur leurs deux jambes, parfaitement valides.
2. A chacune des visites suivantes,
les patients donnent des signes de plus en plus visibles d'épuisement. Certains
même très jeunes, perdent subitement leurs cheveux et deviennent
progressivement bouffis de visage comme sous l'effet de certains poisons ou
alcools absorbés à doses toxiques.
3. Dès que ces patients cessent
de se rendre chez leur cancérologue, leurs troubles disparaissent, leurs
cheveux repoussent, leur visage reprend un aspect normal et leur fatigue
générale s'estompe.
4. Si, après un laps de temps
moyen évalué par Larminier à deux ans minimum et sept ans maximum, ces patients
retournent voir leurs cancérologues, les troubles cités plus haut s'installent
à nouveau et, cette fois, de façon irréversible.
5. L'observation de ces
phénomènes prouve donc de façon formelle que le cancer est une maladie
provoquée par les cancérologues.
M
Morituri (Léonidas), médecin, physicien, philosophe, humaniste, sociologue et
véliplanchiste vénitien né à Venise (1981-2060), célèbre pour ses travaux sur
le travail.
La doctrine philosophique de Léonidas Morituri repose sur le
concept fondamental de la double existence de l'homme "être" et
"non-être" qui ne peuvent se rejoindre qu'après la mort dan un
"non-Au-delà". Avant la mort, l' "être" ne peut se
substituer au "non-être" ni l' "effacer", mais l'
"être" conscient peut essuyer le "non-être" dans une introspection
réfléchie volontaire : "Je pense, donc j'essuie."
En 2009, Morituri révolutionnait le tourisme vénitien en créant
les premières gondoles à moteur six cylindres en V à boîte de vitesses
automatique, et le 4 mars 2010, méritait le prix Nobel de physique en
traversant le grand canal de Venise en sept secondes huit dixième ; les
gondoliers pouvaient désormais transporter 11 234,7 amoureux à l'heure, soit un
bond prodigieux de neuf cents pour cent par rapport à l'époque des gondoles
Diesel.
Certes, on était encore loin de la Venise moderne que nous
connaissons aujourd'hui, avec ses canaux bétonnés, ses ponts rasés et son
palais des Doges rehaussé des trente étages abritant le ministère européen de
Sauvegarde des Sites, mais c'était déjà un progrès, et le progrès, c'est
toujours un pas de plus, je ne saurais pas vous dire vers quel sommet, vers
quel abîme de félicité, mais l'important, c'est d'avancer. D'avancer les yeux
fermés pour ne pas voir venir le coup de faux définitif au coin du bois où nous
n'irons plus danser.
N
Noël nom donné par les chrétiens à l'ensemble des festivités
commémoratives de l'anniversaire de la naissance de Jésus-Christ, dit le
"Nazaréen", célèbre illusionniste
palestinien de la première année du premier siècle pendant lui-même.
Chez le chrétien moyen, les festivités de Noël s'étalent du 24
décembre au soir au 25 décembre au crépuscule.
Ces festivités sont : le dîner, la messe de minuit
(facultative), le réveillon, le vomi du réveillon, la remise des cadeaux, le
déjeuner de Noël, le vomi du déjeuner de Noël et la bise à la tante qui pique.
Le dîner : généralement frugal; rillettes, pâté, coup de rouge, poulet
froid, coup de rouge, coup de rouge. Il n'a d'autre fonction que de
"caler" l'estomac de chrétien afin de lui permettre d'attendre
l'heure tardive du réveillon sans souffrir de la faim.
La messe de
minuit : c'est une messe comme les autres, sauf
qu'elle a lieu à vingt-deux heures, et que la nature exceptionnellement joviale
de l'évènement fêté apporte à la liturgie traditionnelle un je-ne-sais-quoi de
guilleret qu'on ne retrouve pas dans les messes des morts.
Au cours de ce rituel, le prêtre, de son ample voix ponctuée de
grands gestes vides de cormoran timide, exalte en d'eunuquiens aigus à faire
vibrer le temple, la liesse béate et parfumée du Golan pour s'éclater le surmoi
dans la contemplation agricole d'un improbable dieu de paille vagissant dans le
foin entre une viande rouge sur pied et un porte-misère borné, pour le rachat à
long terme des âmes des employés de bureau adultères, des notaires luxurieux,
des filles de ferme fouille-tiroir, des chefs de cabinet pédophiles, des
collecteurs d'impôts impies, des tourneurs-fraiseurs parjures, des O.S.
orgueilleux, des putains colériques, des éboueurs avares, des équarisseur
grossiers, des préfets fourbes, des militaires indélicats, des
manipulateurs-vérificateurs méchants, des informaticiens louches, j'en passe et
de plus humains.
A la fin de l'office, il n'est pas rare que le prêtre larmoie
sur la misère du monde, le non-respect des cessez-le-feu et la détresse des
enfants affamés, singulièrement intolérable en cette nuit de l'Enfant.
Le réveillon : c'est le moment familial où la fête de Noël prend tout son
sens. Il s'agit de saluer l'avènement du Christ en ingurgitant, à dose limite
avant éclatement, suffisamment de victuailles hypercaloriques pour épuiser en
un soir le budget mensuel d'un ménage moyen. D'après les chiffres de l'UNICEF,
l'équivalent en riz complet de l'ensemble foie gras-pâté en croûte-bûche au
beurre englouti par chaque chrétien au cours du réveillon permettrait de sauver
de la faim pendant un an un enfant du Tiers Monde sur le point de crever le
ventre caverneux, le squelette à fleur de peau, et le regard innommable de ses yeux
brûlants levé vers rien sans que Dieu s'en émeuve, occupé qu'Il est à compter
les siens éructant dans la graisse de Noël et flatulant dans la soie floue de
leur caleçons communs, sans que leur cœur jamais ne s'ouvre pour roter.
La remise des cadeaux : après avoir vomi son réveillon, le chrétien s'endort l'âme en
paix. Au matin, il mange du bicarbonate de soude et rote épanoui tandis que ses
enfants gras cueillent sur un sapin mort des tanks et des poupées molles à tête
revêche comme on fait maintenant.
Le déjeuner du réveillon
: la panse ulcérée et le foie sur les genoux, le chrétien
néanmoins se rempiffre à plein groin, se revautre en couinant de plaisir dans
les saindoux compacts, les tripailles sculptées de son cousin cochon et les
pâtisseries immondes, indécemment ouvragées en bois mort bouffi. O buches de Noël,
indécents mandrins innervés de pistache infamante et claqués de multicolores
gluances hyperglycémiques, plus douillettement couchées dans la crème que Jésus
sur la paille, vous êtes le vrai symbole de Noël.
La bise à la tante qui
pique : après avoir vomi son déjeuner, le
chrétien reçoit la tante qui pique et la donne à sucer à ses enfants. Si elle
pique beaucoup, la tante qui pique devra attendre le Nouvel An pour que les
enfants du chrétien aillent lui brouter le parchemin maxillaire contre deux cents
grammes de confiseries.
Le Nouvel An est l'occasion de festivités exactement semblables
à celles de Noël, à ce détail près qu'il s'agit cette fois d'un rite païen.
O
Océanie un des cinq continents,
poliment méprisé par la plupart des quatre autres.
L'Océanie est un archipel compris entre l'Asie à l'ouest et
l'Amérique à l'est. Certaines de des îles ne sont que des atolls madréporiques
offrant de singuliers paysages tout à fait incroyables et peu prévisibles dans
l'imagerie traditionnelle du Bellifontain moyen.
Les habitants de l'Océanie sont les Papouins, les Javaniques,
les Australous et les Malaisés. Certains portent des plumes autour des pieds,
d'autres vont fesses au vent, d'autres encore mangent des chiens et appellent
leur cochon Kiki, au lieu de faire le contraire, et le Bellifontain s'étonne un
peu plus.
Les animaux océaniens sont l'émeu, le galéopithèque, le dingo,
le nasique, le koala, l'aptéryx, le cygne noir, le gibbon soucieux,
l'ornithorynque, la lyre-jacasse, qui n'a pas sa langue dans sa poche, et le
kangourou non plus.
L'Océanie produit du café, des épices, du quartz aurifère, du
camphre et de l'indigo qui donne son bleu soutenu à la moquette de la salle des
fêtes de l'Association sportive de Fontainebleau.
P
Paris ville de France aux murs chargés d'histoire et au sol couvert
de crottes de chiens.
Les premiers habitants de Paris s'appelaient les Parisiiiiiiii à
cause de leur habileté à glisser et à freiner dans les crottes de chiens. Aujourd'hui,
les habitants de Paris s'appellent les Parichiens parce qu'ils aboient pour
faire pousser les pommes de terre. Exemple : "T'avances, eh, patate "
(Victor Hugo, Racines)
Paris est le siège du gouvernement de la France. Tous les cinq
ou sept ans, une bande d'incompétents cyniques de gauche à une bande
d'incompétents cyniques de droite, et le peuple éperdu d'espoir s'écrie
"On a gagné" à travers les rues de Paris, sans même s'apercevoir
qu'il continue de glisser dans la merde de la Bastille à la Nation.
Peinard, face à la Seine, le palais bourbonne.
Paris est célèbre dans le monde entier par le nombre incroyable
de ses arrondissements. Ces principaux arrondissements sont : le premier, le deuxième,
le troisième, le quatrième, le cinquième, le sixième, le septième, le huitième,
le neuvième, le dixième, le onzième, le douzième, le treizième, la quatorzième,
le quinzième, le dix-septième, le dix-huitième, le dix-neuvième, le vingtième.
De nombreux plans de Paris font également état d'un seizième
arrondissement; mais nous préférons ici le passer sous silence, car c'est un
arrondissement extrêmement vulgaire, tape-à-l'œil et gourmetté au point que les
passants n'y passent pas, ils cliquettent.
Revoyons maintenant la ville de Paris arrondissement par
arrondissement avec une attention plus soutenue.
1er arrondissement : remarquable pour la place Vendôme dont la beauté tranquille abrite
de feutrés diamantaires courbés d'émotion devant les satrapes orientaux cousus
d'or noir. Pour le musée du Louvre aux statues égyptiennes inhumaines à force
de pureté, et son premier étage où le gardien fier mais usé répète en vain que
"non, madame, la Joconde, ce n'est pas une toile, c'est sur du bois".
Et puis aussi pour le jardin des Tuileries, trop bien rangé-carré peut-être,
mais dont les marronniers, de siècle en siècle, continuent d'ombrager les
amours naissantes et les ruptures orageuses, ponctuant sobrement les soupirs et
les pleurs de ploc-ploc rustique de leurs marrons mûrs s'éclatant sur les
gueules des transis enlacés.
2ème arrondissement : La Bourse à ma gauche, les putes à ma droite, c'est
l'arrondissement de l'argent en gros et de l'amour en stock.
Du côté de la rue d'Aboukir, des juifs débordés virevoltent, les
bras chargés de coupons de rayonne. Le chômeur mou les regarde courir. Il se
demande s'il est vraiment urgent de vendre du tissu quand il fait si beau.
3ème arrondissement : "à l'âge où s'amuser tout seul ne suffit plus", j'ai
connu une naine rue des Minimes. Cela ne s'oublie pas. Employée aux Archives
nationales, elle avait un sens du rythme époustouflant. C'est, à ma
connaissance, la seule documentaliste assermentée capable de téter un homme en
twistant sur du Cloclo.
4ème arrondissement : le centre Pompidou a longtemps divisé les Parisiens en trois
grandes catégories : ceux qui trouvaient ça laid, ceux qui trouvaient ça beau,
et ceux qui se demandaient s'il fallait trouver ça laid ou beau pour avoir
l'air dans le coup. Rien n'est plus incertain que le sens architectural des
Parisiens. On a vu les mêmes honnir le Sacré-Cœur et s'esbaudir à Beaubourg après
avoir déchiré leur T-shirt en pleurant des larmes de sang devant la démolition
des ferrailleries utilitaires de M. Baltard.
5ème arrondissement : on en retiendra la Panthéon, où s'entreposent de considérables
rogatons que les puissants temporaires viennent fleurir en s'émouvant face aux
caméras, l'hôpital du Val-de-Grâce où les militaires ont le bon goût de
souffrir un peu, le jardin des Plantes, où les enfants se rient de la plainte
du loup fou enfermé, qui tourne et tourne en rond jusqu'à saigner des griffes,
et les foutoirs estudiantins hantés de longilignes couillons pré-fatigués,
embrumés d'herbes troubles et peu prompts à penser.
6ème arrondissement : moins authentique qu'une euphorie au Préfontaines, c'est la
quartier Latin. D'ailleurs, on y mange mal, mais grec. Merci mon Dieu, merci
Carpeaux, le jardin du Luxembourg a conservé son charme bon chic, bon genre,
belles dames de France encore un peu crinoliennes et poussant des landaus
raffinés sous les fenêtre du palais où passe, parfois feutrée, l'ombre
balzacienne d'un sénateur enflé. De Saint-Placide à Vavin, les enfants du
collège Stanislas, la nuque droite et l'œil poli, continuent d'assurer la
survie du blazer en milieu para-texan.
7ème arrondissement : tour Eiffel : vous qui pleurez sur Baltard, rappelez-vous que
nos grands pères identiques exigèrent à hauts cris la destruction de cette
"vivante apologie métallique du mauvais goût français". De considérables
sommités médicales déclarèrent sans rire qu' "on s'y pouvait faire mourir
de raréfaction de l'air après le premier étage". Les mêmes, pour tout
dire, pérorent encore à l'Ordre des médecins où, faute d'avoir pu brûler
Pasteur pour hérésie, ils se vengent en pourchassant le guérisseur, convaincus
qu'ils sont de détenir de droit divin le monopole de l'incompétence face au
cancer.
8ème arrondissement : bruyant, affairé, fourmillant le jour, ce quartier devient, à
la nuit tombée, plus sinistre qu'un chapeau mou sur un potentat soviétique.
C'est le pays des bureaux. La nuit, les gardiens du même nom affichent
tristement sous leur casquette l'œil méticuleux des mortels gagne-petit
préoccupés de se ménager l'avenir en s'achetant des crématoriums en viager.
Saint-Lazare est essentiellement une gare de banlieue. On ne s'y étreint guère pour
des adieux mouillés comme à Montparnasse ou Austerlitz. On s'y bouscule, on s'y
piétine, on s'y hait brièvement. La buraliste s'agace, le guichetier fulmine,
me merguézien n'a pas la frite.
Sur le mur de la Cour du Havre, à plus d'un mètre du sol, on peut
lire sous un trait large peint à l'huile : "Crue de 1910." On dit aujourd'hui
que, par la grâce des ingénieurs des Eaux-et-Rivières susceptibles de hauts et
bas, Paris est désormais à l'abri d'un tel débordement. Et je dis que c'est
triste. L'idée de mourir un jour sans avoir eu la chance de voir Paris noyé à
hauteur de béret m'est intolérable. Les bagnoles qui puent, qui vroument, les
mammifères de bureau vibratiles, les pépés grommeleux à bout de chien chieur,
les amoureux par deux, les Nippons touristiques, contempler toute cette vase
d'humanité pour quelques heures enfouie sous l'eau lisse et tranquille de la
Seine éternelle, dans le silence où passe une mouette étonnée qui se pose sur
la crête émergée d'un parcmètre englouti et voit passer trois képis bleus
flottant vers Rouen et les mers atlantiques, ah, merde à Dieu, mourir après je
veux bien, voir Naples avant, je m'en fous.
9ème arrondissement : appelé ainsi en hommage à Blanche de Castille qui s'y fit
engrosser neuf fois pas Henri le Mutin.
C'est le seul arrondissement de Paris réellement digne
d'intérêt. Ce jugement péremptoire pourra choquer le lecteur en droit
d'attendre plus d'objectivité de la part d'un dictionnaire, mais, compte tenu
de la partialité de certains bulletins météorologiques, ou de l'orientation
politique sournoisement insufflé dans la rédaction des pages jaunes de
l'annuaire, j'aurais tort de me gêner, comme disait Blanche de Castille en
noyant des fœtus sous le Pont-Neuf, appelé ainsi pour les raisons déjà
précisées plus haut.
L'intérêt du neuvième arrondissement de Paris, aux yeux subjectifs
de l'auteur, ne réside pas dans le fait qu'on y rencontre, rue Pigalle ou rue
Frochot, d'inamovibles hétaïres isothermiques, le jambon toujours offert aux
frimas montmartrois. Ni dans l'élégant fourmillement des grands magasins où la
Parisienne épanouie pimpe à tous les étages. Ni dans l'érotisme glacé des
Folies-Bergères (entrez blancs moutons…). Ni dans l'ordonnancement m'as-tu-vu
des beaux immeubles du baron Haussmann. Simplement, c'est là, dans le neuvième
arrondissement, entre le Printemps et l'Olympia, qu'ont brûlé mes années
jeunes, que j'ai fait mes plus belles bêtises et mes plus beaux enfants. On n'a
pas idée d'avoir ses racines et sa
nostalgie si loin des pâquerettes, mais aujourd'hui encore, tandis qu'à
l'ordinaire je bourgeoise et jardine à l'autre bout de Paris, le cœur me serre
à la traversée de la Chaussée-d'Antin.
10ème arrondissement : quartier gris. La rue Lafayette qui finit mal, avec ce pont
hideux de ciment croisé au-dessus des rails. La gare de l'Est, la gare des
guerres allemandes et des services militaires à Epinal :
"Avec ce train ventru
qui ronronne et soupire
et qui va nous conduire
jusqu'au malentendu."
11ème arrondissement : c'est le lieu commun du non-tourisme parisien. L'Américain s'y
fait rare, le Nippon s'y désole, le Hollandais lui-même s'aperçoit qu'il s'y
emmerde. Le onzième n'irradie pas. Il est anti-monumental. Et ne me parlez pas
de l'église Saint-Ambroise. Quand je la croise, j'ai honte pour Dieu.
12ème arrondissement : Le campanile de la gare de Lyon bande au sud, c'est plus gai.
Au bord de la Seine et de mourir bientôt sous les bulls, les entrepôts de Bercy
où j'ai mes amis pour trinquer sous les arbres, forment un fabuleux village
finissant, qui sent bon la futaille et les caves d'antan. Rue de
Château-Lafite, cour Margaux, enclos du Mâconnais, rues pavées à l'herbe
hirsute cernées de maisons basses. Passe un vieux chat tripode. Dans l'antre
poussiéreux de ses cognacs centenaires, M. Celestin se chauffe au poêle de
fonte qu'il a acheté en 1928, putain d'année pour les bordeaux.
13ème arrondissement : normalement, aux avrils moins frais où les clochards s'enfuient
effarés de la Salle Pétrière, il en est un, plus très quinquagénaire et
franchement haillonné, qui rêve assis place d'Italie, au coin de l'avenue de
Choisy. Je connais par cœur le texte du panneau de carton sale calé par sa
sébile et qui lui tient lieu de carte de visite :
"J'ai soif.
A titre indicatif, notez
Les tarifs moyens pratiqués dans
Le quartier
Petit blanc : 3,50 F
Ballon de rouge : 2 F
Demi-pression : 4 F."
14ème arrondissement : pour les ultimes fanas du charleston, les fantômes titubants
des Fitzgerald ivres morts hantent peut-être encore le mont Parnasse de Port-Royal
à la Gaîté. Mais les années ne sont plus folles. Plus de peintres à la Coupole.
Des cadres.
15ème arrondissement : le cimetière de Vaugirard est le plus petit de Paris. Personne
ne sais vraiment où il est. Quelquefois les morts ne savent pas y aller. Ils attendent
le Jugement dernier dans de fragiles autos noires mal garées rue Lecourbe.
Au début des années soixante, à la caserne Dupleix, entre le
boulevard de Grenelle et l'avenue de Suffren, devant la guérite qui fait face à
la rue Desaix, se tenait, troufioniquement raide et grossier, un sous-officier
de cavalerie rouge viné qui accueillait les enfants en âge de guerre coloniale
par des beuglements triomphaux :"Alors, les petits pédés, on l'a dans le
cul !".
J'espère qu'il est mort dans d'atroces souffrances.
17ème arrondissement : c'est l'arrondissement le plus riche en grandes places rondes
et cossues aux terrasses feuillues et garnies d'écaillers prospères. A leurs
tables, le bourgeois lent suce l'huître en appréciant la bourse. Au lycée
Carnot, où j'ai souffert avec soin d'être obligé d'apprendre, nous étions fiers
et bêtes. La fesse gauche de mon professeur de philo avait été mordue par un
obus allemand, et le maître de chimie avait la voix flûtée. Nous les appelions
Demi-Lune et Quart-de-Couille. La honte aujourd'hui encore m'empourpre.
Peut-être espèrent-ils que je suis mort dans d'atroces souffrances ?
18ème arrondissement : les samedis de soleil voient les automobiles s'emplir de
Parisiens familiaux chargés de presse-purée, de chats domestiques et de progénitures
énervées. A midi chaud, la fourmilière est vide et frappée de silence. Alors,
des murs gris des boulevards, de la Capelle à Clichy, suinte lentement la
coulée douce des immigrés. Désolamment endimanchés ou quasiment princiers dans
les toges arrogantes des rois de pays peulh, ils sortent promener leur solitude
comme on va faire pisser son chien, sans joie, sans trop penser, et en trottant
derrière. Ça et là, quelque raciste pauvre les croise avec dédain.
19ème arrondissement : rue de Belleville ou avenue Secrétan, le marché est partout et
tout le temps. C'est le Paris-village encore qui dure. Merci poissonnier. Tu
sens meilleur que le psychanalyste.
Aux Buttes-Chaumont, le plus vieux manège était déjà là quand
mon père était petit. J'y mène mes enfants. Ça tourne et ça nous pousse. La
mort est un tour de cochon.
Je me demande si le cimetière de la Villette n'est pas plus
petit que celui de Vaugirard?
20ème arrondissement : on me dit que c'est un quartier populaire. Il faudra que
j'aille voir.
Q
Québec province du Canada située au nord-est des Etats-Unis,
essentiellement peuplée de Berrichons en Cadillac appelés Québécois. La langue
officielle est le français, qui est
mâché par six millions de personnes.
Le Québécois est hospitalier, travailleur, rarement iroquois,
souvent chômeur. Il est extraordinairement ouvert et souriant. On a même vu des
fonctionnaires québécois dire bonjour. L'hiver, sa tête émerge à peine de deux
mètres de neige. Il se bat contre la glace à coups de pelle fracassants que sa
stature bûcheronne autorise à merveille. Détruire la glace est l'unique souci
hivernal du Québécois. Il la broie, la pile, la chauffe au chalumeau, la
réduisant parfois en eau.
Aux beaux jours, le merle francophone trille la la outi. Le
Québec aussitôt déshiberne et se met à fondre de partout, dans la rumeur
bouillonnante de mille torrents fous. Alors, le Québécois s'affole de voir
toute cette eau lui échapper. Il la stocke bien vite dans des congélateurs
considérables et des distributeurs de glaçons que le visiteur étonné découvre à
tout bout de champ de maïs en la moindre gargote. Conserver la glace est
l'unique souci estival du Québécois.
Les villes les plus connues du Québec sont Montréal et Québec.
Même mon beau-frère Christian, qui fait du rock'n roll, en a entendu parler.
Large, paisible et feuillue, Montréal s'enorgueillit de joyeuses
rues piétonnes ouvertes aux palabres futiles et propices aux funambules. On y
goûte aux terrasses le spaghetti et l'osso bucco canadien, bassement calqué sur
les recettes italiennes, à ce détail près que le bout de veau y est remplacé
par des genoux de castor au sirop d'érable pour adoucir.
La nuit, rue Sainte-Catherine, au Club 281, six éphèbes
oubliables s'étirent sans joie la zigounette sous le nez d'une clientèle
féminine que ces ondulantes caoutchouteries exacerbent peu, car la femme plus
souvent bande à cœur.
Québec est plus monmartroise et, quoique altière et fortifiée
depuis Champlain, plus putassement touristique, avec ses barbes à papistes, ses
bateleurs frelatés, ses loubards las à motos sales. L'autochtone effrayé, avant
de fuir l'août fébrile, met sa cabane au cadenas.
R
Reiser (Jean-Marc), philosophe français né d'un péché de la chair et mort d'un
cancer des os (1941-1983)
S
Saint-Gilles-Croix-de-Viestation de
bains et port de pêche vendéen, entre Saint-Jean-de-Monts, au nord et les
Sables-d'Olonne, en dessous.
La plage est belle et le sable est fin. De mi-juillet à la fin
août, l'ouvrier parisien, debout dans son caleçon coloré, les mains sur les
hanches et tourné vers la le large, se demande ce qu'il fait là. Il a le nez
flamboyant au noroît, le cheveu qui moutonne à la brise, le regard étal, et
l'humour à marée basse sous le flot montant des jacasseries balnéaires de sa belle-mère
toujours recommencée.
C'est une plage comme une autre, avec des joies simples de
plage, et des jeux qu'on ébauche sans jamais les finir, avec de variqueuses
épicières que la marée surprend, et de bruyants fraiseurs-sertisseurs, couchés
dans le clapot, la fraise sertie d'algues mortes et le nombre ensablé. Au midi
surchauffé, des connes définitivement brûlent au second degré avec un soin
extrême, se craquèlent et se cloquent sans frémir d'un orteil, dans l'espoir
fou de se donner au cuir la couleur brun luisant des cacas bien portants.
Parfois, quand le vent souffle de la terre, des enfants d'imbéciles
disparaissent au large sur le matelas pneumatique publicitaire des moteurs
Fend-la-Bise. La mouette s'inquiète à peine de leurs cris déchirants quand le froid
les saisit à la lune.
Curiosité locale : Saint-Gilles-Croix-de-Vie est la seule ville
de bord de mer au monde où les pouvoirs publics ont pensé à mettre des baraques
foraines et des parkings automobiles tout autour du port afin que les touristes
ne puissent jamais voir la mer et les bateaux. C'est une curiosité pétaradante
qui mérite le détour, encore qu'on puisse jouir du même paysage sans quitter
Clermont-Ferrand.
T
Tintoret (Iacopo Robusti, dit le), peintre italien, né à Venise
(1518-1594). On lui doit un grand nombre d'œuvres religieuses ou historiques,
remarquables par la fougue inventive et la puissance du coloris. La plupart de
ces œuvres sont au palais des Doges de Venise et la Scuola di San Rocco, à
Venise également.
On ressent assez vite, à la contemplation d'une toile du
Tintoret, un léger ennui qu'on ne retrouve pas à la lecture de Fluide glacial, où Edika dessine très
bien les bites.
U
Unescomot formé des initiales des mots anglais United Nations
Educational, Scientific and Cultural Organization, institution spécialisée de
l'Organisation des Nations Unies, constituée en 1946 pour protéger les libertés
humaines et développer la culture.
La maison de l'Unesco, à Paris, est l'œuvre des architectes
Zehrfuss, Nervi et Breuer, qui feraient mieux de se cacher.
V
Vivaldi (Antonio), compositeur
italien, né à Venise (1678-1741).
Célèbre virtuose, auteur de musique religieuse, d'opéras, de
sonates, de symphonies, il a imposé le concerto à trois mouvements et le
couvre-feu à vingt-deux heures sur la piazetta di San Marco dont il fut le
vicaire borné pendant plus de vingt ans.
Quand j'était presque encore petit, à la campagne, j'attendais
que la nuit d'été fût très noire pour installer le haut-parleur de mon
"Teppaz" en haut du grand tilleul, et j'écoutais la Notte en comptant
les étoiles, couché dans l'herbe et des vagues de chagrin voluptueux me
couraient sur la peau, comme quand on est loin de l'autre qu'on aime et que
c'est déchirant pour les joies ordinaires.
Aujourd'hui, j'ai une maxi-chaîne deux fois cent watts. En
grandissant, l'oreille s'affine et le cœur se serre.
W
Warszawa (fr Varsovie)ville
polonaise où les arbres ont le droit de pousser la nuit.
X
Xaintrailles ou Saintrailles (Pierre-Henri
de), zoologue français (1904-1980), descendant direct du maréchal
Jean de Xaintrailles (1400-1461) qui accompagna Jeanne d'Arc au siège
d'Orléans, à Chinon, à Vendôme, à Rouen; bref, c'est tout juste s'il ne l'accompagnait
pas aux cabinets.
Pierre-Henri de Xaintrailles fut le premier zoologue français à
s'intéresser au gnou. Il est de fait qu'à part l'admirable poème d'Alfred de
Vigny, la Mort du gnou, aucun ouvrage
sérieux n'accordait à ce fier bestiau sud-africain la place qu'il méritait dans
la littérature animalière scientifique. Dans ses deux essais majeurs Sur les Gnous et le Gnou de Baskerville, parus respectivement en 1947 et 1951, après
les deux séjours de Xaintrailles à Baskerville (Afrique du Sud), l'auteur nous
décrit par le menu les mœurs et coutumes d'une famille de gnous dont il
partagea la tanière pendant plus de six mois avant de s'apercevoir que c'était
des vaches.
En 1978, Xaintrailles retourne en Afrique, à la demande du
gouvernement belge, pour étudier d'autres anthropoïdes. Le savant sillonnera
pendant plus de six mois les bords de l'équateur avant de publier son troisième
essai scientifique uniquement consacré aux grands singes. On en retiendra
essentiellement le chapitre iv, dans lequel l'auteur nous décrit par le menu
les mœurs et coutumes d'une femelle de gorille dont il partagea la tanière
pendant trois mois avant de s'apercevoir que c'était un mâle.
Parmi les autres animaux sauvages étudiés par Xaintrailles,
citons en vrac le rat des champs, la vache rieuse, le compère-lireli, la
mésange fouille-merde, le crapaud joli.
Avant de mourir, le 6 mars 1980, broyé sous un cageot
d'asperges, alors qu'il étudiait le rat des villes à la loupe devant chez
Fauchon, Xaintrailles dit "Aaaah."
Y
Yang-Tseu-Kiang(le), le plus long fleuve de Chine, appelé aussi fleuve Bleu bien qu'il tire sur le
rouge*.
Le Yang-Tseu-Kiang est un fleuve surprenant. Un de mes amis
brasseur d'affaires internationales, qui l'avait bien descendu et à qui je
demandais ses impressions, m'a répondu : "Le Yang-Tseu-Kiang est un fleuve
surprenant."
C'est bien ce que je disais.
*En chine, il est interdit de tirer sur quelque rouge que ce
soit.
Z
Zamenhof (Lejzer Ludwik), médecin et linguiste
polonais, né à Bialystok (1859-1917). On lui doit l'invention de l'espéranto.
Tout le monde s'en fout et c'est dommage. Quand on sait qu'à la
base de tous les conflits, de toutes les haines, de toutes les guerres, de tous
les racismes, il y a la peur de l'Autre, c'est-à-dire de celui qui ne s'habille
pas comme moi, qui ne chante pas comme moi, qui ne danse pas comme moi, qui ne
prie pas comme moi, qui ne parle pas comme moi; quand on sait ces choses,
dis-je, on est en droit de se demander si, par-dessus les têtes couronnées des
potentats abscons qui nous poussent au massacre tous les quatre printemps,
l'usage d'une langue universelle ne saurait pas nous aider à résoudre nos
litiges et à tolérer nos différences avant l'heure imbécile du fusil qu'on
décroche et du clairon qui pouète. Enfin. Bon. Utopie.
Lejzer Ludwik Zalenhof est mort à Varsovie le 5 septembre 1917,
dans des circonstances dramatiques. Il n'est pas trop fort de dire qu'il est
mort pour l'espéranto. Ce jour-là, il descendait la Vistule. Un alligator,
d'autant plus désagréable qu'il s'emmerdait tout seul (la proportion
d'alligators par habitant en Pologne n'atteint pas zéro pour mille), fit
volontairement chavirer son frêle esquif dans les eaux troubles et glauques.
L'alligator, qui ne savait pas nager, coula à pic. Quant à Zamenhof, c'est en
vain qu'il appela à l'aide les nombreux pêcheurs à la ligne témoins du drame.
Aucun de ces braves hommes ne parlait l'espéranto. Aucun ne comprit que le
vibrant "Au secouro !" poussé par Zamenhof signifiait "Au secours !" Ainsi, alors que
d'autres, comme la marquise de Pompadour, réussissent une carrière grâce au
maniement d'une langue, Lejzer Ludwik Zamenhof mourut d'avoir voulu montrer la
sienne à tous les passants.
Aujourd'hui, Zamenhof repose à l'ombre d'un grand cyprès dans le
cimetière juif de Varsovie.
Pourquoi au cimetière juif, alors que, de notoriété publique, il
était plus catholique qu'un essaim d'intégristes ? Parce que Zamenhof, jusqu'au
fidèle à son idéal, avait exigé que l'adresse de sa dernière demeure figurât en
espéranto sur le couvercle de son cercueil.
Pour un croque-mort polonais, hélas, l'espéranto, c'est de
l'hébreu.
Alors qu'on pensait que la seule personne ayant dépassé les 120
était Jeanne Calment, une Indonésienne affirme être âgée de 157
ans.
Jeanne Calment battue haut la
main. Le recensement mené ces dernières semaines en Indonésie
a permis de "découvrir" une femme affirmant être âgée
de 157 ans dans un petit village de l'île de Sumatra, a annoncé
lundi 7 juin un responsable du Bureau des statistiques. Des agents
recenseurs jugent envisageable que Turinah puisse être née en 1853,
comme elle le leur a dit en mai, même si le seul être humain connu
ayant vécu plus de 120 ans est la française Jeanne Calment, décédé
en 1997 à 122 ans.
"Il n'y a pas de documents authentiques pour prouver son âge
mais, sur la base de ses déclarations et en prenant en compte l'âge
de sa fille adoptive, qui a 108 ans, il est difficile d'en douter",
a déclaré Jhonny Sardjono, un responsable des services du
recensement. Turinah continue de s'activer autour de la maison où
elle habite et a fumé des cigarettes aux clous de girofle toute sa
vie, a-t-il indiqué.
Une excellente mémoire et une bonne vue
"Malgré son âge, elle conserve une excellente mémoire, une
bonne vue et n'a pas de problème d'audition. Elle parle néerlandais
presque couramment", a ajouté le responsable. L'Indonésie a
été une colonie néerlandaise pendant plusieurs siècles avant la
guerre de 1939-45 suivie de l'indépendance.
Sardjono a indiqué que Turinah avait brûlé tous ses papiers
d'identité en 1965 afin d'éviter d'être liée aux communistes,
dont un grand nombre ont été massacrés après avoir été accusés
d'avoir fomenté un coup d'Etat.
Une autre Indonésienne a affirmé aux agents recenseurs être
âgée de 145 ans.